Il n'est pas toujours évident de cerner Richard Fleischer, faiseur prolifique de l'âge d'or hollywoodien mais également auteur sombre à ses heures perdues. Si l'on excepte Conan le Destructeur et Kalidor (pour lesquels j'ai une tendre affection, malgré tout), je n'ai jamais été déçu par le bonhomme. Je dirais même plus qu'en deux occasions, Soleil Vert et L’étrangleur de Boston, il a su se faire une place de choix dans mon cœur. The Narrow Margin, ou L'énigme du Chicago Express, de son triste titre français, exploite la voix de la série B qui ne laisse pas de place pour les imperfections et l'ennui. La même recette qui fera le succès du très bon Les inconnus dans la ville.

Difficile de faire plus efficace et concis : une intrigue simple dans un lieu confiné, le tout sur un peu plus de soixante-dix minutes de film, tournées par ailleurs sur treize jours. Évidemment c'est là où Fleischer (qui a au passage payé une partie du film de sa poche) tire son épingle du jeu en proposant une recette de cinéma qui évacue plus que jamais tout le superflu et se contente du strict nécessaire pour donner des leçons dans le genre. En à peine quelques minutes les enjeux sont posés, sans besoin de rajouter de l'emphase mélo-dramatique, de la musique ou des pans de scénario hors-sujet. Ici les personnages sont secs et directs, comme le film. Tout va droit au but.

Évidemment c'est une fois à l'intérieur du fameux train mis en scène par le film que toute la tension commence à monter, savamment orchestrée par un Fleischer qui décidément a parfaitement compris comment filmer son environnement. Rarement un cadre en format académique (1.37) n'aura été aussi bien utilisé justement que dans les espaces confinés des coursives du train. Le tempo est finement maitrisé : le rythme est effréné tout en faisant ressentir le temps qui s'écoule lentement pour les protagoniste, sous l'épée de Damoclès qui plane au-dessus de leur tête. Et ce, sans interruption jusqu'à la fin, pendant que les idées de mise en scènes se multiplient.

Une fois de plus, on tient un formidable exemple du film qui révèle tout l'intérêt que l'on se doit de porter à la série B, toujours plus riche et surprenante qu'elle n'y parait. The Narrow Margin est élégant comme un authentique film noir se doit de l'être, sans fioritures et porté par des acteurs charismatiques aux punchlines comme on en fait plus. A découvrir !

A l'occasion je jetterai un coup d'oeil au remake de Peter Hyams de 1990.
ltschaffer
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Oeuvres cinématographiques vues ou revues en l'an de grâce 2014

Créée

le 3 oct. 2014

Critique lue 468 fois

9 j'aime

Lt Schaffer

Écrit par

Critique lue 468 fois

9

D'autres avis sur L'Énigme du Chicago Express

L'Énigme du Chicago Express
Sergent_Pepper
8

Petit bijou RKO

Petit bijou RKO, film noir au budget limité (pas de tête d’affiche, 13 jours de tournage !) magnifié par une mise en scène inventive. La majorité du film se passe dans un train, et l’on pense bien...

le 29 sept. 2013

30 j'aime

5

L'Énigme du Chicago Express
Torpenn
7

Compartiment tueurs

Encore une série B nerveuse de la RKO avec tout ce qu'il faut en 1h11 chrono ! Très chouette film de train sur le convoyage d'un témoin vital a un procès contre la pègre... Un casting moyen mais qui...

le 31 janv. 2011

22 j'aime

7

L'Énigme du Chicago Express
Pruneau
7

Fleischer Price

On sait que le huis clos dans un train est devenu un classique depuis Hitchcock, Fleischer reprend la recette en version série B de la RKO. 1 h 11 au compteur, c'est vif, ça court partout, du coup...

le 27 déc. 2010

14 j'aime

18

Du même critique

Le Hobbit : La Désolation de Smaug
ltschaffer
6

La déception de Smaug

En initiant sa nouvelle saga avec l’excellent Le Hobbit : un voyage inattendu, Peter Jackson a divisé les foules, s’attirant les ires d’une partie du public qui souhait vraisemblablement retrouver...

le 9 déc. 2013

71 j'aime

4

Le Convoi de la peur
ltschaffer
10

Voyage au bout du Styx

A l'occasion de la ressortie de Sorcerer par La Rabbia, j'en profite pour remettre à jour une ancienne critique de cette version restaurée, rédigée alors qu'elle avait été présentée à la Cinémathèque...

le 29 oct. 2012

54 j'aime

7