Premier film de la période américaine de Jean Renoir, L’Etang tragique est peut-être le plus réussi de la série. D’emblée, il adopte le ton hollywoodien au point que l’on a plus d’une fois l’impression d’être dans un film de John Ford… Il faut dire qu’il n’est pas mal servi par la distribution : Walter Brennan en faux coupable, Walter Huston en père de roc et d’airain, Anne Baxter émouvante en sauvageonne et surtout Dana Andrews, excellent et tout en nuances dans le rôle du jeune héros qui se forge peu à peu une personnalité et une maturité d’adulte. Les seconds rôles sont tout aussi intéressants puisqu’ils sont tenus – excusez du peu – par Eugene Pallette, John Carradine et Ward Bond, entre autres. Et, pour couronner le tout, Renoir se fait assister au scénario par un des plus grands de tous les temps, Dudley Nichols soi-même (celui de La Chevauchée fantastique !) qui lui concocte une histoire puissante qui respire l’authenticité. Tout cela nous donne un film au rythme soutenu, aux éclairages magiques, le plus souvent tourné en décors naturels dans les marais du Sud des Etats-Unis et dont la forme autant que le fond épousent ceux du genre le plus traditionnel américain – le western – sans que jamais Renoir y laisse son identité. Un film à découvrir d’urgence.