Isabelle la cathodique
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Isabelle Adjani c'est Elle. Qu'ajouter à cela ? Le fantasme masculin de la nymphette affriolante mais désabusée. Le drame de la beauté d'un personnage admirablement écrit. Miss cambrousse exhibitionniste (nu intégral !) et spécialiste du calcul mental. Son échappatoire. Le souvenir et le bonheur de celui qu'elle croyait être son père. Mais la petite fille à maman compliquée(s) a toujours besoin de son biberon. De sa fusion. La poupée miro, tête à claque, allumeuse et arrogante, qu'on a parfois envie de baffer. Hystérique et pleureuse, mais capable d'émouvoir surtout. L'embrasser. La prendre lorsqu'elle tortille son joli derrière à qui veut bien la suivre, histoire de ne pas avoir à exposer sa si profonde faille... L'incandescence et le désir à portée de tous. La manipulation aussi. Un personnage clairement très loin de la caricature et du cliché.
Isabelle Adjani illumine la pellicule, donnant la réplique à Alain Souchon et sa voix-off de velours, dans un rôle lui allant comme un gant. "La souche" incarne Pin Pon, un pompier qui n'aime pas trop qu'on l'appelle comme ça et qui finira par tomber sous le charme de la belle. Et comme Pin Pon ne s'y prendra pas comme les autres hommes pour arriver à ses fins, mettant les petits plats dans les grands, Elle - ou Eliane - finira par s'attacher. Un gars gentil, travailleur, presque niais, entouré de sa mère, particulièrement coincée, de sa gentille tante "sono cassée", et de ses deux frères (un gars simple fan de cyclisme, son confident ; et le benjamin de la famille, timide et intello). Un gars qui ira même jusqu'à se marier avec celle qui dit tout et dont tout est dit, pour le meilleur, mais surtout pour le pire, parce qu'on n'assure jamais la liberté...
Des personnages passionnants donc, mais aussi d'excellents dialogues qui donnent franchement envie de s'intéresser de plus près au livre de Sébastien Japrisot et à son intrigue vengeresse. D'où vient ce traumatisme lié au piano mécanique ? Qui est le vrai père d'Eliane depuis que celle-ci a compris que son beau-père (Michel Galabru) ne lui donnerai jamais son nom ? Pas quelqu'un de recommandable apparemment... Quoi qu'il en soit, Eliane mènera l'enquête, se servant des un(e)s et des autres, mais surtout de ses charmes afin de découvrir la vérité. Elle les rendra fous et les emmènera dans son sillon, pour un dénouement, et notamment un dernier plan, mémorable. Une fin comme on les adore : sèche, puissante, émouvante.
Et franchement, à part quelques longueurs çà et là, L'Eté Meurtrier fait partie de ces grands drames à la française, parfaitement adaptés, qui ont tendance à nous rendre nostalgiques d'un cinéma aussi intelligent qu'atypique.
Créée
le 9 mai 2016
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