Après un premier épisode culte, puis un second dont on ne sait pas si on doit l’aimer ou le détester, débarque quatre ans plus tard L’histoire sans fin 3. Après la sorcière Xayide, Bastien se retrouve aux prises avec un gang de jeunes plutôt hargneux, commandés par un certain Jack Black. Détesté par la plupart des fans à cause de l'absence de fidélité à l'œuvre originale, ce chapitre 3 clôturant la franchise au cinéma mérite-t-il tant de haine ?
Quand l’animatronique sauvait un film
Depuis sa création au cinéma en 1984, la franchise de L’histoire sans fin en aura bavée. On en a vu des franchises massacrées à cause de nombreuses suites détruisant l’âme de leur film original. Pour L’histoire sans fin, c’est quelque peu spécial. L’histoire sans fin 2 par exemple, malgré son remaniement de casting, ses effets visuels et ses musiques modifiées, son histoire un peu plate, était plus réussit sur un plan : le jeu de Jonathan Brandis. Personnage gagnant en profondeur, il apportait ce petit plus à cette suite pas franchement réjouissante.
Quatre ans plus tard, déboule un troisième chapitre. On prend les mêmes et on recommence ? Non, on rechange ENCORE tout. Et là, quand je dis tout, c’est vraiment TOUT. Restriction de budget oblige, personnages, décors, bestiaire et accessoires, L’histoire sans fin 3 reprend vulgairement les bases du chapitre 1 et construit un troisième épisode original, n’ayant jamais existé dans la version papier. Partant de là, on serait en droit d’hésité à regarder cette suite. Clairement, cette suite a été pensée en priorité pour les enfants. Raison pour laquelle j’ai tant aimé ce film dans ma jeunesse et maintenant (nostalgie ?).
Pourtant, question bonnes idées, on peut dire que Peter MacDonald a fait un peu plus d’efforts que George Trumbull Miller ne sachant pas s’il doit montrer ses propres idées ou recycler celles de Wolfgang Petersen. MacDonald n’a pas le budget mais il prend des risques à grand renfort d’animatroniques, prothèses et maquillage pas si crados que ça. Une histoire mieux écrite bien plus captivante que son prédécesseur, une distribution d’acteurs et actrices un peu plus motivés (Jack Black hilarant, Jason James Richter s’en sort avec les honneurs), un choix de casting assez bien trouvé, des décors proches de ce que nous offrait le chapitre 1, et un grand nombre de créatures plus loufoques et délirantes les unes que les autres.
Oui, outre l’horreur qu’est devenu visuellement les plans panoramiques de Fantasia (pauvre tour d’ivoire…si tenté que ce soit elle), le premier truc qui saute aux yeux dans ce chapitre ce sont toutes ses petites créatures peuplant le royaume de Fantasia. Bienvenu dans une véritable œuvre fantastique. Visuellement, ça reste un poil moins beau que L’histoire sans fin premier du nom, MAIS, qu’est ce qu’on rigole de voir toutes ses créatures crées en animatronique. Criantes de réalisme bien qu’un peu raides par moments. L’histoire sans fin 3 sera de plus l’occasion de revoir des têtes connues mais aussi de nouveaux personnages. L’absence d’Atreyu se faisant un peu ressentir, le réalisateur arrive à nous faire oublier le personnage en mettant sur le devant de la scène :
• Barky, un arbre vivant un peu râleur mais délirant (Groot avant l'heure),
• Junior, le fils naïf et maladroit du mangeur de pierres,
• Engywook le gnome scientifique et sa femme Urgl qui continuent autant de se chamailler comme un vieux couple au bord du gouffre,
• Falkor, notre dragon porte bonheur devenu plus un chien volant qu’un dragon.
Mais comment quelque chose qui se passe en ce moment peut être dans ce
bouquin ? C'est impossible !
Retour à Fantasia ou pas ?!
Attention, ce n’est pas parce que j’ai aimé ce film que je ne suis pas objectif pour autant. Des défauts, ce chapitre 3 les cumuls. Le premier : oubliez l’évasion littéraire propre à la franchise. En effet, ici, on se concentrera surtout sur la psychologie familiale.
Peter MacDonald profite de cette nouvelle aventure pour continuer à donner plus d’épaisseur au personnage de Bastien interprété cette fois par Jason James Richter de « Sauvez Willy ». Ici, le réalisateur fait à notre héros le plus beau des cadeaux : une vie de famille. Ne croyez pas que cette nouvelle vie sera rose pour le jeune garçon. Au contraire. Comme toutes familles recomposées, il y a toujours les blessures du passé, les hauts et les bas de ce bouleversement. Déménagement, nouvelle école, nouveaux amis, pas facile de créer des liens entre frères et sœurs, beau père et belle fille. Flanqué d’une peste de demi-sœur n’acceptant pas que sa mère se soit recasée, et d’une belle mère maladroite tentant tant bien que mal de construire une vraie vie de famille, voila que Bastien en prend encore plein la figure à l’école en devenant la nouvelle proie d’une bande de blousons noirs semant la terreur dans les couloirs, squattant le sous sol d’un centre commercial.
Fort heureusement, Bastien peut toujours s’évader dans ses livres. Il retrouvera « par le plus grand des hasards » Mr Koreander, nouveau bibliothécaire du lycée qui…comme par le plus grand des hasards, a ramené avec lui l’histoire sans fin. L’histoire sans fin qui a visiblement été rééditée en vue du nouveau visuel de sa couverture. Une horreur. Quant à l’Auryn, elle a perdue toute sa splendeur, devenue une sorte de grossière contrefaçon réalisée en pate à modeler par un enfant de 4 ans.
Malheureusement, on n’en restera pas là ! Non respect de son propre sous titre français et anglais (« retour à Fantasia » et « s’évader de Fantasia » alors que les trois quart du film sont dans le monde réel. Vous voyez le souci ?), nouvelle absence du thème chanté par Limahl, bardé d’incohérences (Engywook faisant référence à Arnold Schwarzenegger alors qu’il n’est pas censé connaitre son existence, Engywook et sa femme connaissant l’adresse postale du nouveau domicile de Bastien), des voix françaises qui n’ont pas toujours le ton juste (encore une idée de sketch pour Les inconnus ?), méchants plus intelligents que notre héros un brin simplet (pour ce qui est d’utilisé l’Auryn), les incrustations sur fond vert, les scènes de vol immondes (qui a jeté sa peluche dans les airs pour simuler un dragon volant ?), le jeu plus que médiocre de Julie Cox (l’impératrice) dont la doublure française la rend hystérique au possible, l’affrontement entre Bastien et Slip (pas le sous vêtement, le chef des blousons noirs), la fin ridicule hyper clichée (ENCORE un message d’amour familial), et l’énième changement d’acteurs qui commence sérieusement à énerver.
J’ai l’impression d’embrasser le trottoir.
Les Fantasiens dans le monde réel
L’histoire sans fin 3 a beau cumuler les défauts et fautes de mauvais gouts, Peter MacDonald, nous console avec ses nouveaux personnages et retour de certains anciens. Pas de problèmes du coté du design des nouveaux protagonistes de cette suite.
Junior par exemple, il est carrément plus trognon que ce pauvre bébé changé en pierres dans L’histoire sans fin 2. Regardez les finitions, les sourcils/lèvres/nez/oreilles jusqu’à la couche faite de roches, la manière dont il bouge et se déplace, sa voix aigue un peu cassante, nous sommes vraiment face à un être de pierre. Junior, notre fan de rock, il est adorable, maladroit, naïf et tendre malgré sa force surhumaine. Il fait vraiment gros bébé. Le voir interagir avec Bastien, Barky et Falkor dans le monde des humains sera jubilatoire au possible. Sans lui et la réussite de son doublage français, L’histoire sans fin 3 aurait bel et bien mérité de figurer dans la liste des pires films de tous les temps.
Barky, rien à dire, là encore le visuel passe de commentaires, on a rien oublié, le nid sur sa tête formant une sorte de couronne, les doigts de pieds en forme de racines, ses quelques branches collées à son dos, sa voix grave et cassante, un véritable arbre prenant vie sous nos yeux et se déplacement comme tel.
Engywook et sa femme, bien qu’il y est changement d’interprètes, on gardés leur design d’antan. Les voix françaises restent similaires à l’original. Un autre bon point.
Pour Falkor, là c’est un problème de taille. Ca c’était dégradé dans le chapitre 2 mais là, on a franchit le point de non retour. Pourquoi avoir repensé une énième fois le personnage ? Pourquoi ne pas avoir reprit l’animatronique utilisé dans le chapitre 1 ? Là, nous sommes plus face à un grand Terrier écossais volant qu’un dragon de couleur rosacée avec des petites écailles sur le corps. Falkor garde son coté protecteur, sage et gentil. Là au moins, ça va, même si on le verra, en débarquant sur Terre,
Partagé pour ce qui est du nouveau design du mangeur de pierres devenu un papa et mari aimant. La copie conforme d’Homer Simpson mais version responsable. Quant à sa femme, pur cliché de la femme au foyer avec son tablier, ses pantoufles et ses bigoudis, qu’est ce qu’elle fait rire.
Cette fois-ci, la majorité de notre histoire se déroulera dans le monde réel. On inverse l’idée de téléporter Bastien à Fantasia. Ici, bien que le jeune garçon y fasse brièvement un saut, ce sont Falkor, Barky, Junior et les gnomes qui viendront dans le monde réel. Tout comme Les visiteurs, ce concept donnera lieu à des moments amusants en voyant ces êtres fantastiques évoluer dans un monde qu’ils ne connaissent pas. Barky sera horrifié de voir ce qu’on fait aux arbres sur Terre (jolie référence à massacre à la tronçonneuse), Junior escaladera le mont Rushmore en chipant au passage le bout du nez de George Washington, Falkor jouera les gentlemans avec un avion de ligne, tout en tentant quelques temps plus tard de séduire un faux dragon en papier défilant lors du nouvel an chinois. Oui, c’est bel et bien l’animatronique et l’humour qui sauvent ce film de la ruine.
Bastien a un cœur formidable mais ce n’est pas exactement Arnold
Schwarzenegger question muscles n’est ce pas ?
Au final, les enfants trouveront leur compte avec L’histoire sans fin 3. Diversité des décors détaillés (la maison des mangeurs de pierres constituée de meubles en pierre et donc de beaucoup de poussière, la maison faite de grands et petits branchages d’Engywook et sa femme, la montagne égarée ressemblant à la forteresse de solitude de Superman), des personnages, musiques féériques et pop sympathiques, histoire intéressante, répliques et scènes tordantes bien que parfois bon enfant. Pour les plus grands et plus pointilleux, c’est approximativement le même genre que Les tortues Ninja 3. Très drôle, un peu émouvant, mais un épisode souillant l’âme même de la franchise.