Quand RZA, rappeur mondialement connu et membre d’un des groupes de rap les plus influents, le Wu-Tang Clan, s’engage dans un pastiche des films de la Shaw Brothers, c’est un hommage de prime abord généreux, mais terriblement médiocre auquel on a droit.

L’influence de RZA est grande. Après s’être essayé au métier d’acteur avec plus ou moins de succès (notamment avec Jim Jarmusch ou dans la série Californication), le voilà à la tête d’une production certes de petite envergure (15 millions de dollars), mais en bonne compagnie. Oui, RZA sait s’entourer : Quentin Tarantino à la production, Eli Roth au scénario, Russell Crowe et Lucy Liu devant la caméra. Pour la bande originale, pas de problème, on demande aux copains : le reste du Wu-Tang Clan, Kanye West, The Black Keys, Talib Kweli.

Un générique dans la règle de l’art. Typographie, arrêt sur image, danse martiale, tout y est. Il ne manque que le logo de la Shaw et on s’y croirait. L’amour pour le genre transparaît instantanément. Un village où la violence règne, un dirigeant brave, des fils adoptifs comploteurs, une maison close, une grosse quantité d’or, tous les ingrédients sont donc réunis pour nous offrir un spectacle trépidant. Tout fleure bon le film cool, alors qu’est-ce qui cloche au fond ?

À peu près tout. Ce genre de pastiche, de déclaration d’amour à un certain cinéma, on a envie de l’aimer, de le soutenir. On voudrait qu’il nous ramène à un temps révolu, qu’il nous délivre des bouffées de nostalgie, on voudrait un véritable hommage. Las ! The Man With The Iron Fists tutoie involontairement la parodie. RZA, malgré toute sa bonne volonté, n’a vraisemblablement pas saisi tout ce qui faisait l’essence des films de la Shaw Brothers.

Plus le film avance, et plus l’impression d’un assemblage de séquences relevant plus d’un caprice immature que d’un véritable hommage s’installe. La passion du début est étouffée. Le spectateur semble être mis de côté assez rapidement. RZA réalise le film avant tout pour se faire plaisir, on l’aura compris. Il n’hésite alors pas à incorporer des éléments de Western, de Blaxploitation, de Chanbara. Oui, le cinéma d’exploitation, c’est cool. RZA a vu les derniers films de Tarantino et de Rodriguez. On ajoute des gloires locales (Gordon Liu, Chen-Kuen Tai), des has-been (Pam Grier pour un cameo ridicule) et des mauvais acteurs (Byron Mann, le Ryu du Street Fighter avec JCVD) pour montrer que quand même, on fait preuve de distance avec le sujet.

Esthétiquement, on est bien plus proche du 300 de Zack Snyder ou même de la série Spartacus: Blood and Sand que de Chang Cheh, Liu-Chia Liang ou Chu Yuan, qui sont ouvertement cités. On atteint des sommets d’immondices lors de séquences abusant de split screens et de ralentis « snyderiens ». Ce qui prouve que l’approche de RZA tient plus du pot-pourri thématique et visuel que du véritable hommage qu’on était en droit d’attendre du membre du Wu-Tang Clan. On voit bien que RZA a vu la Trilogie du sabreur manchot, La 36ème chambre de Shaolin ou La guerre des clans, mais ce n’est hélas pas suffisant.

On en arrive à trouver le temps long durant les 1h35 de The Man With The Iron Fists. Prévisible, mou, et aux dialogues indigents, le film n’est hélas pas sauvé par des combats chorégraphiés sans une once d’inspiration par Corey Yuen, qu’on a évidemment connu en meilleure forme.

Baignant dans un sérieux assez ridicule, qui rend le film encore plus grotesque, on aurait presque aimé une approche parodique à la Black Dynamite de Scott Sanders, qui rendait un vibrant hommage aux films de la blaxploitation tout en offrant de véritables moments de comédie. En l’état, The Man With The Iron fists, donne l’impression d’être un caprice à 15 millions de dollars, par et pour un fanboy et ses amis.
Jeremy_Coifman
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le 13 mai 2013

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