Alors, il y a des films qu'on voit parce qu'on a encore l'illusion que certains acteurs ne se commettront pas à faire n'importe quoi. Mais comme fredonnait Gabin, on ne sait jamais rien.
Pourtant Tony Curtis a de la voilure à côté de ses airs vaporeux de star Hollywoodienne. Le monsieur devrait avoir eu une réputation à défendre. On n'imagine pas non plus Patrick Macnee, curieusement presque invisible dans la distribution présentée par SC malgré sa présence fréquente à l'écran, tendre son chapeau melon ouverture en haut pour quémander des dollars américains au petit hasard la chance.
Toujours est-il que les deux princes de l'écran se sont mis dans un bien minable bourbier. L'homme homard patauge en effet dans une bouillie d'intentions puériles allant de la réalisation d'un film à partir d'une boutade lancée par Orson Welles (dont le réalisateur de ce déchet était le monteur attitré) à la parodie éculée des nanars de S-F désargentés d'après-guerre. Comme si le ridicule de ces films, elephant-man du côté péripatéticien du show-business, avait besoin d'être parodié ! Il suffit pourtant de voir un film aussi pathétique (bien que réalisé avec les plus sérieuses intentions) qu'Appel d'urgence (Miracle mile) sorti un an avant L'homme homard pour constater qu'au cinéma le ridicule ne tue pas. Au contraire, il trouve un public adapté à son niveau.
L'Homme homard, qui a quand même fini par coûter la bagatelle de 800 000 $ (dont 100 000 $ rien que pour Tony Curtis qui a avoué n'avoir accepté le rôle que pour l'argent) s'applique à atteindre le niveau d'un film raté d'étudiant en première année de cinéma pas doué. Alors pourquoi avoir réalisé et sorti L'homme homard ? Pourquoi gaspiller autant d'argent (et de talents réels) pour fabriquer volontairement un navet quand il y en a tant de disponibles dans les bas-fonds de la production ? Juste pour dire qu'on a réalisé un film ? Y a-t-il tant de Bernard Henri-Lévy que ça dans le monde ?
Certains savent faire des parodies pour en exploiter une poésie tirée de leur maladresse, à l'image de Lloyd Kaufman avec Poultrygeist. Dans le cas l'Homme homard et de son oubliable réalisateur, on touche tellement le fond qu'il serait audacieux d'envisager d'en faire une parodie.
Reste qu'un peu crevé, avec des potes et une certaine quantité d'alcool dans le sang par un fin de soirée sans imagination, les scènes grotesques de l'Homme-homard peuvent arracher quelques rires rougeauds. D'où le deux étoiles.
Bonne chance et bon courage à celles et ceux qui vont le voir quand même.