Je n'étais pas partie très enthousiaste, à vrai dire, parce que ça ressemblait à un téléfilm et que je ne fais pas tellement confiance aux scénaristes allemands pour produire des histoires trépidantes. Le traumatisme Tagart, Tattort et autres enquêteurs asthmatiques à demi-paralysés. Comme quoi il faut réessayer, parfois, parce que cette histoire affiche de jolis moyens, premièrement, dans la reconstitution des villes et colonies allemandes de la charnière entre le XIXè et le XXè siècle. Pas Hollywoodien, mais très honnête, à vrai dire. Ensuite, parce que l'épisode peu glorieux de notre voisine, elle aussi puissance coloniale à laquelle nous n'avons rien à remontrer, mérite d'être raconté, et raconté de cette façon, empathique et pleine de tact à la fois. Il faut avouer que les épisodes tragiques de la soumission des ethnies locales par la puissante Allemagne pourraient tout bonnement soulever le cœur, et qu'on ne sort pas de cette narration indemne. Pour tout dire, c'est susceptible de bien pourrir la nuit de sommeil suivante. Il vaut mieux éviter d'aller se coucher dans la foulée. Une petite série anglaise sans prétention et assez légère comme Mum peut faire l'affaire, j'ai testé. Sur le coup, les mésaventures du jeune héros, Hoffmann, ethnologue en herbe passablement candide, parti en Afrique sur les traces de son père aventurier, pourraient constituer, dans un monde post réélection du Président américain, à l'heure ou tous les tyrans du monde semblent éprouver de la nostalgie pour les heures tragiques de la construction de la puissance occidentale, une véritable raison d'aller s'enfermer dans une grotte au fin fond des bois, loin des reliquats de ce vieux monde nauséabond. A se demander si on va finir, collectivement, comme espèce, à sortir des ornières fangeuses dans lesquelles on patauge depuis des siècles. Peut-être qu'il faut effectivement revenir encore et encore sur ce passé peu glorieux, voire infamant, pour convaincre nos semblables de la nécessité de se tourner vers d'autres réflexes. Certaines images insoutenables achèvent de convaincre de l'urgence de reconsidérer nos priorités. Bref, le cœur au bord des lèvres, l'estomac révulsé par toutes les injustices sur lesquelles nous assoient tranquillement nos naissances avantageuses, je recommande malgré tout cette mise à l'épreuve salutaire de notre humanité. Hauts les cœurs !