"Mannen som slutade röka", traduit en français par "L'Homme qui a renoncé au tabac", figure parmi les innombrables films dits cultes appartenant à un patrimoine national (en l'occurrence, c'est en Suède que ça se passe) mais qui n'ont jamais réellement dépassé les frontières. Il appartient à cette catégorie de films ultra célèbres et connus de toute une population, mais dont la notoriété s'effondre dès lors qu'on quitte un périmètre donné. C'est un peu "Le Dîner de cons" suédois, en quelque sorte...
La mécanique comique est ici structurée autour d'une histoire de succession : à la mort d'un grand patron de l'industrie de la saucisse, ce dernier conditionne l'héritage de sa fortune très conséquente qui doit revenir à son fils. Il ne pourra mettre la main sur le magot que s'il parvient à s'arrêter de fumer pendant un an, et il dispose de deux semaines pour se sevrer. Autrement, l'argent ira à son oncle. Une situation initiale pleine de non-sens, qui n'a pour unique but que de placer le protagoniste face à un défi quasiment intenable, lui qui est un fumeur acharné et compulsif.
Dans le rôle principal, un certain Gösta Ekman qui pourrait très bien être le cousin suédois de Martin Freeman, personnage légèrement veule qui accèdera à une autre dimension dès lors qu'il s'attèlera à sa tâche de sevrage. Selon sa théorie, les addictions fonctionnent par vases communicants, et autant dire que le tabac vampirisait absolument tous les autres : l'arrêt de la cigarette va provoquer un torrent de pulsions en matière de vices autres, alcool, sexe, etc. La comédie est relevée par le fait qu'il engage de son propre chef un détective privé (particulièrement loufoque) pour qu'il le suive et l'empêche de fumer à nouveau par tous les moyens, en intervenant au moindre signe annonciateur. De l'autre côté, son ongle a engagé une personne pour l'influencer en sens inverse.
Un long passage en France, censée représenter la destination idéale pour une rémission, met en lumière Raymond Bussières dans le rôle d'un des deux agents, à l'origine de nombreux passages un peu poussifs — mais non dénués de charme dans l'opposition entre cultures suédoise et française. Histoire d'enfoncer le clou de la comédie, le film s'inspire de la "Divine Comédie" de Dante, qui donne son nom au héros, au gré de trois actes, l'enfer, le purgatoire et le paradis.