Ce film ne parle pas de drague car la dragueurs sont lamentables. C'est l'évocation brute de la séduction, l'art d'être pris au jeu ou de jouer. Le titre est un slogan qui annonce tout. Bertrand aime les femmes, ce défilé après le dénouement final de toutes ces filles qui ont composées sa vie est un diaporama exhaustif de son oeuvre d'homme. Son tort est de ne pas avoir aimé la Femme, pourrait-on dire ?
La réalisation - comme d'habitude - superbe de Truffaut ne laisse aucune subtilité au placard. Les acteurs déroulent un texte parfait, lumineux d'esprit et d'harmonie. Aucune ficelle n'est trop grossière, trop épaisse. L'amour est là avec l'éditrice, le temps d'une scène de dialogue après la consommation de ce même amour, comme si Bernard ne pouvait être simple qu'après avoir triomphé. Cet homme apparait comme un bourreau infortuné tant il fait souffrir celles qui croisent sa route.
Delphine est le personnage de femme le plus brillamment écrit. Cette femme inquiétée, qui vibre par l'inquiétude, sur la lame du rasoir, qui aime Bernard mais qui aime aussi l'aspect extra-conjugal de sa relation avec lui. Elle aime être jalouse et le montrer. Elle aime la volupté. Alors même qu'elle sort de huit ans de prison pour un crime passionnel dont des jurés zélés auraient pu considérer que l'affaire implique aussi Bernard, elle pardonne sans mal.
Geneviève apparait en revanche comme un alter-ego féminin à Bernard, capable de cadrer ses faiblesses et de sublimer ses forces. Elle est indépendante et spontanée. Elle le comprend et comprend sa littérature. Lumineuse en somme. L'intrigue décidera autrement de l'avenir de cet amour.
Truffaut fait rêver les amoureux des femmes avec ses plans de jambes. Ce plan dans la salle d'attente avec des dizaines de femmes en jupes courtes arborant de superbes compas. Ces plans dans la rue où les femmes marchant à toute allure arc-boutées sur ces jambes longues et sveltes. Ce descriptif parfait et cette différenciation astucieuse entre les petites pommes et les grandes tiges. Dichotomie si vraie et pourtant difficile à exprimer.
Ces femmes et ces jambes, Bernard va les poursuivre partout. Son obstination prête à briser sa voiture pour retrouver l'une d'entre elle au début du film. La jeune blonde - probablement scandinave - de la compagnie d'assurance qui dit aimer les hommes. Son rendez-vous galant avec Véra, honteuse de sa beauté fanée.
Un film essentiel sur l'écriture et sa difficulté. Surtout sur la séduction, son cocktail de spontanéité et d'acharnement. Sur l'amour et son impossibilité. Si le livre de Bernard était réel, je le lirais avec plaisir.