Histoire et film d'une étrangeté inattendue.
Rien n'est complètement clair, rien n'est imposé comme allant de soi, et plein de pistes sont données sans qu'aucune réponse définitive ne sera donnée au spectateur. . .
Et ça met mal à l'aise...
L'histoire de cette institutrice fascinée par la poésie (elle s'essaye à l'être elle-même), et qui découvre, un jour, qu'un enfant de son école est un Poète.
Fasciné par ses mots, puis par lui.
Elle cherche à le sonder, le connaître, lui provoquer des sensations, des mots, le faire réfléchir (ou voir, en tout cas, le monde autour de lui) : tout ça pour servir sa poésie.
Mais ce gamin a 5 ans. Il écoute, sagement, obéit, puis laisse couler. Il n'est pas indifférent, mais patient et circonspect.
L'institutrice va loin. Très loin.
Ce qui met mal à l'aise, en tant que spectateur bien installé dans ses pensées bien correctes, on pose des limites : ne pas utiliser un enfant, ne pas jouer avec sa psychologie, éviter les rapprochements physiques. Ces limites ne sont jamais complètement franchies, mais c'est là.
Mal à l'aise parce qu'on peut aussi savoir que la poésie, l'art, peut déclencher des comportements extrêmes, sans limite, qui mettent en danger soi et l'autre. Un comportement qui permet à la poésie de trouver sa place. Hors des limites que la société lui impose.
Mais il y a aussi l'égoïsme de l'institutrice.
Elle est visiblement paumée dans sa vie, un peu trop monocorde peut-être. Qui manque de passion. Et elle cherche en l'enfant l'illumination, la chaleur, les émotions qu'elle n'a plus ailleurs.
Les acteurs sont impressionnants.
L'institutrice est incarnée avec une intensité qui force l'admiration. Le regard qu'elle a sur les choses, les gens, le monde. Sans concession. Qui semble vouloir avaler tout ce qu'il voit.
La présence du gamin, très forte, en attente, qu'on sent vraiment entre deux.
Des moments caméras où les acteurs se heurtent à l'image et regardent, de très près "Qui nous sommes". Pourquoi ces regards ? Pour bousculer le spectateur ? Lui montrer qu'il n'est que témoin, mais qu'en tant que témoin il à sa place, on sait qu'il est là ?
Ou pour donner une distance à l'histoire : hé, c'est une œuvre, aussi.
Je ne suis pas certaine de pouvoir conseiller ce film. Il est vraiment troublant. Mais au moins il fait réfléchir.