Un long-métrage danois d'animation, ça pourrait changer un peu de ce qu'on a l'habitude de voir dans les salles hexagonales, qui alternent entre productions Disney, Pixar, Dreamworks et Ghibli. "L'Ours Montagne" aurait donc pu apporter un vrai souffle d'air frais à ce paysage qui, s'il est parfois de qualité, peut aussi amener un certain formatage.
Malheureusement, ce n'est pas ce film qui va apporter une véritable alternative au genre un peu fourre-tout qu'est l'animation. On se trouve face à un conte finalement assez classique, pas déplaisant, mais sans grande originalité dans le thème. Souvent comparé aux œuvres de Miyazaki, il faut avouer qu'il y a des similitudes qui frappent rapidement : bestiaire fourni, forme d'animisme et de magie de la nature (la résurrection de l'Ours), rapport de l'homme à celle-ci (conflit ou rapprochement)... Mais la comparaison s'arrête là et si vous espérez retrouver la profondeur et l'émotion des films du japonais chez le danois, vous serez forcément déçu.
Le tout n'est néanmoins pas si manichéen qu'on pourrait le croire au premier abord avec des gamins et un ours gentil et un chasseur très méchant. Ce "vilain" a ses raisons d'agir, il les énonce clairement, désirant recréer son univers perturbé par le départ de l'Ours Montagne lors de son réveil. Il cherche à dépasser ce sentiment d'abandon et de solitude, la seule solution (absurde) qu'il voit étant de se débarrasser de cet être. Se pose alors la question de la lutte entre une nature elle aussi malmenée par l'humain qui s'y installe sans se poser de question (l'Ours qui se réveille et détruit le village n'est qu'une métaphore) et la manière dont cet humain perd ses repères et cherche par tous les moyens à les retrouver. De là, et malgré une perturbation d'origine "humaine" (l'installation du village sur le dos de l'Ours), le désir de vengeance (qui va ici jusqu'au bout, pas de thème du pardon et de l'harmonie retrouvée) du chasseur peut, sinon être justifié, du moins être compris. A cela s'accole, peut-être un peu maladroitement et de manière un peu superficielle, la relation entre frère et sœur, conflictuelle dans un premier temps avant de trouver un moyen de vivre ensemble, aboutissant ainsi à la conclusion heureuse du film.
Là où le bât blesse, c'est que visuellement un certain manichéisme s'installe. Le chasseur est ainsi traité de la façon la plus désagréable possible, lui aussi est un ours, solitaire et grognon. Ce choix gomme en partie l'intérêt réel du personnage, qui devient tout de suite beaucoup plus manichéen. La forme est elle aussi une semi-déception. Là où on aurait pu s'attendre à quelque chose d'assez onirique, on se retrouve face à quelque chose de trop simpliste, trop tranché, qui manque de nuance, notamment chez les personnages humains. Parti pris graphique ou maladresse, la question se pose, mais en tout cas le résultat final n'est pas à la hauteur. Le film a l'avantage d'être court, l'intrigue avance rapidement, sans temps mort. Rien de contemplatif dans "L'Ours Montagne", alors qu'on aurait pu s'y attendre.
Rappelons néanmoins que c'est là un regard d'adulte sur un film qui s'adresse aux enfants, qui pourront y trouver leur compte/conte (qui s'achève avec le retour à la maison par la porte, encore et toujours symbole de passage), un joli récit d'initiation dans un univers qui sort un peu de l'ordinaire.