Je ne suis pas très fan des films à sketch à la base, mais celui-ci est dans l’ensemble plutôt correct. Car il reste très cinématographique dans sa construction, et on retrouve une certaine homogénéité autour des thèmes abordés. Et puis, chose plutôt intéressante, chaque segment a plutôt une fin douce et amer, voire même nostalgique, tout en étant surprenant quand il le faut. Et cela donne au final, un film plutôt intéressant. On peut d’ailleurs aussi remarquer que chaque segment à un aspect très ancré dans le domaine du conte dans la construction de son intrigue ou son atmosphère, même si ça se ressent plus ou moins selon les segments.
La Ballade de Buster Scruggs (le premier segment donc) sera sans doute le moins intéressant dans le sens où c’est plus un show musical qu’autre chose et le personnage perd un peu rapidement de son charme, même si on retrouve un certain côté pastiche/parodie dans l’approche du thème du hors-là-loi à la gâchette facile. Près d’Algodones est très court, mais reste très efficace au final dans son sujet, à savoir cette sorte d’immuabilité du destin de l’Ouest. Et puis son humour cynique, fonctionne très bien. Ticket repas est sans doute le plus dramatique de tous, et pour cause, l’histoire reste quand même très triste, presque pitoyable en fait, surtout dans sa conclusion. En très peu de temps, on s’en prend à s’attacher au personnage de Harrison.
J’ai beaucoup aimé Gorge dorée, parce que c’est sans doute le plus positif de tous, mais il a aussi ce côté un peu conte de l’ouest, surtout dans son introduction et sa conclusion. Il reste très simple dans son histoire, mais son dernier acte joue à merveille avec la patience des spectateurs, c’est vraiment chouette ! La fille qui fut sonnée, qui est le plus long des segments, et également celui qui a le mérite d’avoir l’histoire la plus développée. Elle est plutôt intéressante, même si très classique, et prend le temps d’élaborer ces personnages, avec une construction assez amusante puisqu’on se retrouve ainsi propulser de petites scénettes en petits scénettes. Quant à Les Restes mortels, j’ai beaucoup aimé sa construction qui repose uniquement sur les dialogues, et comment au fur et à mesure (avec la lumière déclinante), on verse presque dans quelque chose aux résonnances fantastiques, presque fantasmagorique avec le cocher.
Dans l’ensemble des segments, le casting est plutôt bon. On reconnaîtra de nombreuses têtes ici et là (James Franco, Liam Neeson, Brendan Gleeson, Harry Melling, Clancy Brown), mais tous seront plus ou moins du même niveau et franchement pas grand-chose à redire. Techniquement, j’ai beaucoup aimé l’ambiance musicale, qui use à la fois de chansons « traditionnelles », mais la musique sera également au diapason de chaque segment. La mise en scène des frères Coen sera de façon générale très efficace et toujours au poil, avec une photographie et des décors somptueux (sans doute LE gros point fort du film). Le montage sera d’ailleurs très efficace aussi. Oh, et les costumes bien sûr, dans toute la variété du Far West !
Bref, un film qui dans l’ensemble m’a bien plu, même si du coup un peu inégal d’un segment à l’autre. J’avais un peu peur de cet aspect, mais c’est au final très vite passé et ça reste dans l’ensemble six contes très beaux et très intéressants, et surtout, très bien écrits, tout en restant fidèle à l’esprit des frères Coen. À voir !