Ouf... ça ne dure qu'une heure et quart !
Ah ! les films d'art et d'essai... quel tourbillon d'intelligence ! Quelle acuité si délicieusement philosopho-métaphysico-pédantoïde à nous faire percevoir l'absurdité de notre triste condition d'hommes ! Quelle justesse d'analyse psycho-sociale ! Quelle finesse dans l'art (car c'est un art, peut-être le plus illustre, même) de nous rendre sympathiques de pathétiques marginaux rejetés par l'électronique, le moteur à explosion, les pommes de terre frites, et - last but not least - cette ingrate de société !
Ah !
Gênes ! l'unique objet de mon ressentiment !
Gênes à qui vient ton bras d'immoler mon amant !
Gênes qui t'a vu naître et que ton coeur adore!
Gênes enfin que je hais parce qu'elle t'honore !
M'égare-je ?
Gênes saurait le dire.
Ciel ! quelle douce exaltation s'empare de tout mon être (absurde, je le rappelle) devant la peinture si vraie et si réaliste de notre brave repris de justice viril, de notre transsexuel(le ?) cocaïnomane si romantique, des si sensuelles prostituées facétieuses des ruelles ligures, de ces vieux et fiers chantiers navals naguère fringants et impétueux, siège fort et émouvant des humbles et des prolétaires, spoliés par ce monde pourri par l'argent !
Révolte, mes frères ! On en a gros !
La révolution commence dans l'art ! Tiens, si je mettais moi aussi bout à bout des photos et des images d'archives creuses, avec un narrateur qui nous raconterait sa palpitante vie par-dessus, sur fond de critique sociale mêlée sans véritable rapport à une histoire pseudo-romantique insolite (tiens, en prison, par exemple, ça peut être marrant, ça ! ça sortira des sentiers battus ! c'est ça, l'art, après tout !)
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(On me souffle dans l'oreillette que j'en fais un peu trop, en pathos et en mauvaise foi.
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On me dit aussi : "Machin, t'as rien compris, t'es un bourrin, c'est pas la peine de venir cracher ton fiel sur une oeuvre puissante que les vrais cinéphiles apprécieront".
Diable, où ai-je craché mon fiel, moi qui suis en une telle extase devant ce chef d'oeuvre du cinéma contemporain ?)
Juste deux mots pour conclure : "sans intérêt".