Spectaculaire, c'est évidemment le mot pour décrire la première partie du film et aussi ma raison de le voir.

La manière de filmer l'action, la mise en scène, la chorégraphie... M'ont fait rappeler le cinéma hongkongais de Tsui Hark (mouvement de caméra à 180°, suivi de l'action à travers les yeux d'un personnage). Il ne manquait que les effets de ralenti. Ca se veut à la fois impressionnant (par le nombre et la chorégraphie des mouvements des troupes) et "plus humain" (le chaos et la panique du combat, la douleur intense par les blessures par balle ou les éclats d'obus/de grenade).

Le film a quelques jolis plans de paysage soulignant le contraste entre la relative tranquillité au sein des territoires de la concession de Shànghǎi et le champ de désolation de l'immense bataille des mois précédents (quand même 700 000 Chinois face à 300 000 Japonais à la base).

Je note aussi la prise de liberté du déroulement des évènements : l'attaque massive du troisième jour (à coup de tankettes Te-Ke, du déploiement des soldats du génie pour creuser ou sur le point de faire exploser les murs) qui se retrouve au premier jour dans le film. L'attaque au gaz dans l'entrepôt qui n'a jamais eu lieu (mais les Japonais ont bel et bien utilisé du gaz moutarde durant la bataille de Shànghǎi). De même qu'un seul soldat des 452 (ou 423) hommes de l'entrepôt a décidé de sauter et... De se faire sauter ceinturé de grenades. Dans le film, c'est une file d'une dizaine de braves types qui sautent volontairement pour se débarrasser du génie. Disons que ça fait sens pour la propagande chinoise, même pour l'époque.

D'ailleurs, parlons propagande, propagande du PCC. Ce dernier, en 2019, avait jugé que le film ne dépeignait pas suffisamment les officiers du KMT comme des oppresseurs de classe. Ce qui explique les scènes qui, après coup, donnent une réelle impression de rajout pour satisfaire tonton Mao plus que d'utilité à la narration ou même à ce qu'il veut raconter (l'héroïsme guerrier chinois).

La seconde partie du film est sans doute plus décevante. Elle est plus classique dans la manière de filmer et de mettre en scène l'action. Après une première heure spectaculaire faite de sang et de larmes, la seconde partie nous plonge dans le vif du sujet : propagande et héroïsme. Une tendance à exagérer, à trop appuyer sur le bouton du PCC. Néanmoins, il réussit à être cohérent dans son propos, notamment dans les passages oniriques où le jeune soldat de treize ans imagine Zhào Zǐlóng (ou Zhào Yún pour nos joueurs de Dynasty Warriors ou Wo Long) seul face à une armée. À travers le dialogue entre le jeune et un des adultes, ce dernier explique que Zhào Zǐlóng est différent de maître Guān (Guān Yǔ). Si celui-ci se bat pour sa loyauté envers Liú Bèi en tant que frère juré, pour les valeurs de bienveillance et l'amour du peuple ; Zhào Zǐlóng, lui, se bat avant tout pour sa famille et son pays. Ainsi, les 452 (ou les 423) hommes ne se sont pas battus pour leur fidélité à Jiǎng Jièshí ou au KMT en tant que "soldats d'élite équipés à l'allemande", mais bien pour la Chine contre l'envahisseur japonais. C'est d'autant plus symbolisé par le cheval blanc (certains me diraient que ce n'est pas un cheval) qui ne craint aucunement la violence des combats, représentant l'espoir et la volonté de la nation chinoise.

Une des affiches du film illustre d'ailleurs Zhào Zǐlóng sur son cheval calqué au-dessus d'une carte de la Chine.

Si beaucoup ont souligné le côté spectaculaire du film, il ne faut pas oublier qu'il a essayé d'être autre chose : un film qui fait écho au nationalisme chinois actuel, à redorer le blason de la Chine en abordant l'une des périodes les plus sombres de son histoire, à aller dans la continuité du récit national (un évènement aussi anecdotique que l'entrepôt de Sìháng est transformé en bataille dantesque), et à vouloir être un peu plus qu'un simple film de propagande.

Créée

le 12 août 2023

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