Pendant longtemps, je n’ai plus aimé ce film. Je l’avais aimé étant gamin : c’était un film de Gérard Oury, c’est à dire dynamique, spectaculaire, plein de vie et de mouvements, qui danse et fait sourire, avec une certaine bonne humeur dessinée sur les fracas de la grande Histoire. Et puis avec l’âge, je me suis mis à trouver que Pierre Richard en faisait peut-être un peu trop, plus qu’à l’habitude en tout cas. Il me semblait de même que Victor Lanoux n’était pas mal non plus dans l’outrance du gros dur, cynique, violent et simpliste. J’ai essayé deux ou trois revoyures qui m’ont laissé un goût amer de déception confirmée.


Pour cette dernière, le sentiment de frustration s’est bizarrement estompé. Pas complètement disparu, je vois bien en quoi les reproches que je faisais sur l’hystérie de Pierre Richard et la lourdeur de Victor Lanoux sont encore bien d’actualité. Cependant, j’y suis beaucoup moins sensible et j’ai pu apprécier tous les à-côtés que ce périple à travers la France de 1968 met en scène avec une liesse vraiment communicative.


Le mouvement, la course folle dans laquelle tout le film semble s’engouffrer dès le début est très rafraîchissant. A la longue, la relation un brin compliquée de Victor Lanoux et Pierre Richard, que les préjugés sociaux alourdissent assez tristement d’abord, cette relation parvient à se libérer progressivement, à produire quelque chose d’enfin réjouissant, plus joyeux et aimable.


De nombreuses idées, notamment de cascades souriantes et très inventives parsèment le récit et maintiennent une certaine cadence heureuse. On a aussi droit à un sacré numéro d’acteurs avec un couple plutôt inattendu.


Jean-Pierre Darras est une figure connue du cinéma français de l’époque, un acteur qu’on peut admirer par ailleurs, et depuis longtemps notamment à ses débuts en duo avec Philippe Noiret dans les cabarets. Sa participation la plus fameuse reste sans doute celle du Viager. Ici, il fait cause commune -conjugale en l’occurrence- avec une comédienne beaucoup moins connue, Yvonne Gaudeau. Leur association de vieux bourgeois qui fuient les désordres de mai 68 à bord de leur Rolls blindée de lingots, de diamants et de billets est en tout point un bonbon à siroter d’aise. Je les adore, ils sont croquignolesques à souhait! La tête d’ahuri coincée de Jean-Pierre Darras et la non moins pincée d’Yvonne Gaudeau sont irrésistibles.


On appréciera la présence de Raymond Bussières. Encore une fois, Gérard Oury n’oublie pas les bons vieux copains. Dans un tout autre ordre d’idée, on appréciera également celle de Katia Tchenko ou le numéro de vaudeville rural que nous servent l’irascible Claude Brosset et l’émoustillante Blanche Ravalec.


Au final, je ne sais au juste si c’est une question d’humeur (sans doute, comme souvent), mais j’ai passé un chouette moment, malgré les scories ici ou là qui gênent un peu aux entournures.
Captures et trombi

Alligator
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le 21 mars 2017

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Alligator

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