Dany Boon serait-il en manque de succès au point de refaire un film sur les Ch’tis ? Non pas que ses dernières comédies soient des échecs commerciaux, loin de là ! Mais à bien y regarder, vous vous rendrez compte que les scores affichés par ses films diminuent peu à peu : Bienvenue chez les Ch’tis (20,5 millions d’entrées), Rien à déclarer (8,2 millions), Supercondriaque (5,3 millions) et RAID Dingue (4,5 millions). Est-ce pour cela que l’acteur-réalisateur décide de revenir à ce qui a fait sa renommée ? Quelque soit le cas, il faut dire que la formule s’avère payante, La Ch’tite Famille parvenant à faire une première semaine aussi prestigieuse que Rien à déclarer (environs 2,5 millions d’entrées). Ce qui laisse augurer un bien joli score pour le film au box-office. Sans doute pas aussi faramineux que celui de Bienvenue chez les Ch’tis, juste ce qu’il faut pour prétendre au titre de plus grand succès de l’année en France (ayant ses chances de détrôner Les Tuche 3). Mais si je commence cette critique par parler chiffres, c’est pour meubler quelques peu mes propos. Car il faut bien admettre que je n’aurais pas grand-chose à dire sur La Ch’tite Famille, si ce n’est que Dany Boon a su livrer une comédie distrayante mais ô combien lambda, sentant un peu trop le réchauffé pour véritablement amuser.
Ici, il n’est plus question de découvrir le Nord. Point de facteur de la Côté d’Azur muté pour faute déontologique à Bergues, où il va s’acclimater au charme rustique et convivial des Ch’tis ! Ici, il est plutôt question de famille. Plus précisément d’un bobo parisien qui voit sa famille du Ch’nord, qu’il avait effacé de son existence, débarquer à l’occasion des 80 ans de sa mère. Un prétexte pour Dany Boon pour nous parler des valeurs, des racines familiales (prônant une énième fois la fameuse morale de « ne pas oublier d’où l’on vient »). Du choc un brin cliché entre deux milieux sociétaux bien distinct (le chic de la capitale contre la rudesse et le manque de classe de la province). Bref, le genre d’intrigue et de message que le cinéma nous a servi maintes et maintes fois. Et que Dany Boon nous ressert ici sans grande imagination. Car la plupart des situations, des personnages et tout simplement des gags a été éculée au fil des décennies, avec plus de panache et d’inventivité dans bien d’autres titres. Dans La Ch’tite Famille, nous voyageons littéralement en terrain connu, n’étant jamais surpris par l’humour qui nous est ici présenté. Il y a bien quelques réparties, envoyées de bon cœur par l’excellente Valérie Bonneton (comme à son habitude, avec son franc parlé). Quelques comiques de situations à la limite du cartoonesque (les séquences parallèles avec Pierre Richard, père resté à la maison devant se débrouiller tout seul avec les tâches du quotidien). Mais cela reste encore bien trop faible pour réellement satisfaire l’assistance.
Et le plus malheureux dans tout cela, c’est que l’aspect Ch’tis de l’ensemble n’est pas le sujet central de cette comédie. Dans Bienvenue chez les Ch’tis, c’était l’intérêt principal, étant donné que le film avait pour but de nous faire découvrir le Ch’nord avec humour. Dans La Ch’tite Famille, c’est juste un ressort comique optionnel, utilisé pour rallonger le divertissement. Pour ajouter des gags parce que Dany Boon ne semblait pas en avoir suffisamment à revendre, à tel point qu’il reprend sans aucune gêne les mêmes situations que son plus grand succès : l’élocution Ch’tis, l’accent, le mauvais temps (via une évocation de la crème solaire), certains plats traditionnels (comme la carbonate). Même de revoir Line Renaud dans le rôle de la mère de Boon donne l’impression d’une redite non dissimulée. On peut encore en rigoler, il faut bien le reconnaître. Mais l’effet comique n’est plus du tout aussi saisissant car en un film, Dany Boon en avait déjà fait le tour. La Ch’tite Famille en fait donc les frais, n’ayant plus rien de neuf à nous mettre sous la dent. Se montrant beaucoup plus anecdotique qu’autre chose, où tout semble forcé (l’interprétation de certains comédiens, l’accent Ch’tis, certaines répliques, des caméos dispensables au possible) pour divertir l’assistance.
Pas du tout innovant, beaucoup trop gentillet pour convaincre… telles sont les étiquettes qui s’accordent le mieux à La Ch’tite Famille ! Fort de ses succès précédents, Dany Boon révèle de plus en plus son aptitude à se reposer sur ses lauriers. Cela peut fonctionner si l’on n’est pas un spectateur difficile. Mais force est de constater qu’il est navrant que la comédie française ne se résume qu’à des titres interchangeables et à des amuseurs publics qui ne se contentent que d’aligner les projets pour gonfler leur ego (et l’obtention du César du public pour Boon ne va pas arranger les choses).