L'Ours

Rares sont les voyages dans l'Ouest s'arrêtant sur les trappeurs, ces attachants ouvreurs de cavalerie habillés en peau de bête, proches de la nature et étant capables de discuter tant avec les tuniques bleues que les indiens, et c'est ce qui intrigue d'abord dans The Last Frontier d'Anthony Mann.

Derrière ce titre français mensonger se cache une œuvre malheureusement imparfaite certes, mais assez intéressante et jouant sur un cadre passionnant, où la nature est prédominante et les conflits potentiellement intrigants. Effectivement, Mann va mettre en scène plusieurs oppositions, ce qui va rythmer son film, principalement le trappeur face à l'ordre militaire, mais aussi les tuniques bleues face aux indiens, n'oubliant pas non plus une réflexion autour de l'amour dans ce contexte particulier.

Là où l'œuvre déçoit, c'est dans l'incapacité de Mann à sublimer le scénario. Ce dernier est intéressant dans son concept mais moins dans sa mise en oeuvre, avec une finesse d'écriture assez absente, que ce soit dans les personnages, le colonel Marston en tête, ou dans les thématiques où la défense des indiens et la remise en cause de la façon de faire des militaires n'aboutit à aucune réflexion particulière. Le réalisateur ne parvient pas à faire oublier ces aspects, sa mise en scène manquant de finesse, de sensations et d'une atmosphère particulière, et au lieu de ça certaines séquences paraissent inintéressantes, voire même sonnant fausses.

Pourtant tout n'est pas à jeter, et certains aspects marchent plutôt bien, à commencer par le protagoniste qui, par ses conflits et son entêtement, est assez intéressant. Il est en plus assez bien joué par un surprenant Victor Mature, tandis que les autres comédiens se montrent plutôt à la hauteur. La bande-originale est aussi de qualité, et participe aux meilleurs moments du film, lorsqu'il fait ressentir l'aventure et la nature, ce que Mann n'a aucun mal à sublimer lorsqu'il s'en donne la peine.

En signant The Last Frontier, Anthony Mann propose une oeuvre au concept intéressant mais à l'écriture décevante, et le metteur en scène ne parvient que partiellement à sauver ces failles, bien aidé surtout par le cadre naturel et un Victor Mature se donnant la peine de rendre vivant et crédible son personnage.