En 1939, John Ford investi le western et le transforme en genre hollywoodien respectable grâce à La chevauchée fantastique. Il continue pendant deux décennies à alimenter le genre et ses collaborations avec John Wayne resteront l’emblème du western classique. Dix ans après l’œuvre fondatrice, le tandem présente She wore a Yellow Ribbon, deuxième opus d’une trilogie sur la cavalerie américaine ouverte avec Le massacre de Fort Apache et refermée par Rio Grande.
Récit en couleurs, ce western tranche avec le réalisme de ceux produits habituellement par John Ford, en particulier ceux en noir et blanc (y compris l’avant-dernier, Liberty Valance en 1962). Nous sommes en 1949 et c’est la période où les studios aiment exalter les propriétés du Technicolor. Ford et son équipe s’inspirent du peintre Frederic Remington et la réalisation est assez contemplative, le spectateur ayant tout le loisir d’apprécier les paysages.
L’approche générale est à cette image et sera d’autant plus déconcertante pour ceux qui ne sont pas familiarisés avec les westerns antérieurs à ceux de Leone. La charge héroïque (traduction française aberrante) consacre l’essentiel de son temps à la vie en communauté auprès de la cavalerie. Le spectacle rayonne de bonheur et de légèreté ; le désordre et la violence sont les faits des Indiens, encore qu’il y ait les mauvais (mobilisés) et les bons (silencieux).
Et lorsque le bon chef n’est pas mutique, il semble sous amphétamines et à l’instar du capitaine Nathan Brittles au crépuscule de son existence. C’est l’envers d’un trop-plein de gentilles intentions. Toujours dans une veine humaniste et patriote, le cinéma de John Ford évoque ici la transmission et l’harmonie collective de façon mielleuse, en se plombant tout seul lors de ses élans philosophiques.
« Il ne faut pas s’excuser, c’est signe de faiblesse » : si vous ne l’avez pas compris en sortant de la salle, il est temps de sortir de votre coma. En marge du genre, John Ford réalisera Les raisins de la colère, bouleversant et d’une grande finesse. Mais ses westerns, en tout cas les premiers, sont trop compassés. Ford est le parfait représentant d’un cinéma de studios d’une ère optimiste, voir du western familial. Cet opus est l’un des plus doucereux et Rio Bravo semble presque dur et téméraire à côté.
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