John Huston a réalisé La Charge Victorieuse juste après des films comme Key Largo ou encore Quand La Ville Dort, surprenant alors de constater que ce film ressemble à un film mineur du maître, un film « petits bras, petits chocolats » qui semble inabouti et largement en-deçà de ce qu’on aurait pu attendre d’un homme qui semblait maîtriser chaque aspect de son cinéma. Le thème était pourtant propice à de grandes choses, mais une durée de 69 minutes n’a certainement pas aidé Huston à développer l’ampleur et le souffle épique dont il était friand.

Il faut alors prendre cette histoire et ce film pour eux-mêmes sans comparaison avec le reste d’une filmographie exceptionnelle. On nous parachute en pleine Guerre de Sécession, au milieu d’un régiment qui n’en peut plus de manœuvrer à longueur de jours sans jamais aller au combat. Tous on faim d’action, de tumulte et de fureur, tous à l’exception d’Henry, jeune gamin tétanisé par la perspective de ne pas être à la hauteur et de mettre sa vie en jeu. Il s’isole autant que possible, chaque fois en tout cas que sa peur d’aller au combat risque de se lire sur son visage. Alors il donne le change, en paroles, il joue les durs plus que de raison face à ses camarades et arrive tant bien que mal à faire un peu leur admiration. Puis vient le combat et Henry s’enfuit, la seconde partie du film débute sur cette fuite qui verra la transformation de ce soldat trop jeune.

Le film respire l’intelligence d’un John Huston qui réussi à ne pas traiter le cas d’Henry de manière trop manichéenne. Il apparaît tour à tour couard, terriblement agaçant au point de vouloir le gifler, menteur dès qu’il faut sauver la face et émouvant quand cette peur, que nous éprouverions tous à sa place, semble le blesser au plus profond des tripes. Audie Murphy, qui interprète Henry, est parfait dans ce rôle changeant et par définition difficile, il reste que c’est lorsque cette peur le tenaille de toutes parts qu’il est le meilleur et rend ses angoisses communicatives. Même si cet acteur n’est jamais devenu une énorme star, il tournera, outre pour Huston, pour des grands noms tels que Don Siegel ou Mankiewicz.

Côté réalisation, il faut admettre que c’est un Huston en petite forme qu’on nous propose. Il faut en effet attendre la seconde partie du film et le début des combats pour qu’il se retrouve dans son élément et sorte enfin la démultipliée. À partir de là, le plaisir prend le dessus et Huston nous plonge au cœur de l’action, nous faisant monter au combat au plus près de ses personnages et nous montrant toute la fureur, le sang, le bruit et la poussière que chaque guerre porte en son sein. Le réalisateur retrouve cette touche épique qu’il affectionne et nous donne enfin ce que nous attendions, le Grand Souffle.

Certes, ce n’est pas un film majeur de John Huston, SanFelice ne me contredira pas sur ce point (il lui a attribué un petit 5), mais il met en scène un film de guerre qui n’en est pas un et qui se penche sur les hommes, souvent jeunes, leurs peurs, leurs doutes et leur besoin de préserver une vie qu’ils ont le sentiment de ne pas avoir encore vécue. C’est aussi un film sur l’honneur et le besoin d’en recevoir, car il semble que c’est presque la seule source de reconnaissance sociale au sein d’un régiment. D’autres moyens, quelques autres grands acteurs et un peu plus de temps auraient fait de ce film un chef-d’œuvre supplémentaire dans la carrière de Huston, il restera un très bon film.
Jambalaya
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le 7 mai 2013

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