La Chevauchée de l’honneur, réalisé en 1949 par Leslie Fenton, est un western modeste, lorgnant vers la série B, mais qui surprend par son scénario et ses personnages hauts en couleur.


Leslie Fenton, acteur devenu réalisateur, se lance en 1949 dans ce remake du film La Légion des damnés sorti en 1936 et réalisé par le grand King Vidor, mais qui ne fit pas grand bruit à l’époque. Ainsi, Fenton s’appuie sur une histoire déjà écrite et solidement construite, n’y apportant qu’une réalisation plus « moderne » et surtout en couleurs. Le choix de la couleur est d’ailleurs assez contestable, a posteriori, quand on voit le charme que peuvent avoir les westerns en noir et blanc de l’époque. Car ici, pas de Technicolor contrasté à la manière de La Charge héroïque de John Ford, sorti la même année, mais une photographie très blême qu’une réalisation pour le coup fondamentalement littérale ne permet pas d’embellir. C’est là que l’aspect série B, ou du moins film à petit budget, se fait sentir : les décors, les costumes, les effets de sang, et même le jeu des acteurs (lorsqu’ils meurent, se frappent à coup de poings) sonnent assez faux. La caméra, trop sage, ne s’embarrasse pas de mouvements et alterne les champs et contre-champs tout à fait classiques. Les dialogues sont plats, là encore trop littéraux.


Néanmoins, La Chevauchée de l’honneur a des arguments à faire valoir, notamment du côté de ses personnages et de son scénario, riche en rebondissements. Le trio infernal que forment William Holden – le sage, le raisonnable –, William Bendix – le loyal un peu bourru – et Macdonald Carey – l’immoral, l’opportuniste – ne brille pas par son originalité. Ils sont en quelque sorte le Bon, la Brute et le Truand de Leone avant l’heure. Mais leur amitié est bien portée à l’écran, leurs failles, leur loyauté plus ou moins commune en font des personnages attachants et finalement plutôt complexes, alors même qu’ils ne sont plus du même côté de la loi. Autrefois compagnons de méfaits, les personnages d’Holden et Bendix sont devenus des Texas Rangers, et Carey est resté un hors-la-loi. Tout au long du film, la question sera pour les deux premiers de savoir s’ils sont capables de faire triompher la morale et l’honneur sur leur profonde amitié pour le troisième, qui, à l’inverse, deviendra l’antagoniste du film en refusant de questionner ses certitudes et en s’enfonçant petit à petit dans une immoralité irréversible. En acceptant de poursuivre leur ancien ami, qu’ils aiment pourtant toujours, c’est leur propre rédemption qu’ils semblent rechercher. Encore une fois, le chemin sera semé d’embûches et d’événements assez imprévisibles, dont certains vraiment touchants et marquants.


Avec ses acteurs en pleine forme (notamment William Holden, en pleine ascension quelques mois avant un rôle qui changera sa vie, celui dans Boulevard du crépuscule), des retournements de situation forts et une dimension de buddy movie bien explorée, La Chevauchée de l’honneur parvient in fine à faire oublier ses errements techniques et le minimalisme de sa réalisation. À noter, en plus, la présence de Mona Freeman, dont le personnage – quoiqu’un peu anecdotique – permet la remise en cause de la misogynie inconsciente de ces cow-boys, bons ou mauvais, et incarne la volonté libertaire de toute la gente féminine. Un film qui n’a pas trop vieilli, dans son propos et son rythme calibré, et qui sans être inoubliable assure un sympathique moment de cinéma.


[Article à retrouver sur Le Mag du ciné]

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le 20 sept. 2019

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Jules

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