Fascination morbide : la Task Force Ranger comme si vous en étiez
Somalie, octobre 1993, la bataille de Mogadiscio : les Etats-Unis d'Amérique lancent une opération commando afin de capturer en plein cœur de la ville deux lieutenants d'un seigneur de la guerre - insaisissable - qui affame la population en s'emparant de l'aide humanitaire, alors que le pays est en proie à la famine et à la guerre civile entre les clans rivaux. L'hostilité à l'égard des étrangers sur place (soldats combatants et non-combattants, travailleurs humanitaires, journalistes) est presque à son paroxysme après une série d'escarmouches, de raids et de victimes collatérales.
Le propos du film est de montrer cette bataille du point de vue des forces américaines engagées. Ridley Scott opte pour un hyper-réalisme, une esthétique et une violence qui captiveront tout amateur de jeu vidéo de guerre en vue subjective (les fameux FPS, First Person Shooter). C'est le seul et unique but de cette aventure cinématographique. Pas de recul, tout est filmé au plus près des combattants. Pas d'analyse, de message sous-jacent, c'est un film de divertissement. Techniquement incroyable : une très belle image, un sens du montage aigu (du moins pour la première partie du film, ensuite ça en devient un peu longuet) ; Ridley Scott est décidement un réalisateur hors pair. Ses choix (de carrière) sont par contre discutables : devenu tout à la botte d'Hollywood, c'est en fidèle soldat de l'impéralisme américain et de sa vaillante armée qu'il transforme un cinglant revers (un raid devant durer une heure devient deux jours d'une guérilla urbaine acharnée dont les victimes se comptent par centaines) en une héroïque victoire (ce qui est aussi vrai : seulement 18 soldats américains sont morts alors qu'ils étaient pris au piège dans une ville hostile). Film de propafande s'il en est, il pourrait convaincre tout adolescent qui hésite à s'engager. Il rêvera alors de rejoindre les forces spéciales, en particulier la mirifique Delta Force. De leur côté les somaliens servent de faire valoir, bénéficient d'une caractérisation caricaturale et sans profondeur. Évacués en quelques lignes au début et à la fin du film le contexte immédiat et certaines conséquences de l'opération. Aucune empathie pour le sort de la population somalienne prise en tenaille entre les béligérants, la famine et l'exode. Deux heures héroïques pour 18 soldats tombés, deux misérables lignes pour 500,000 civils morts de faim. Aucune tentative pour comprendre ce qui pousse une population à s'emparer de corps étrangers, de cadavres d'un crash d'hélicoptère et à les mutiler et les brandir à la face du monde (une image choc qui a saisi de stupeur et d'effroi les américains - la scène est ici racontée de manière très sobre et brève).
Tous ces élèments à charge et plus encore sont énoncés dans cette excellente critique que je vous encourage à lire : http://www.senscritique.com/film/La_Chute_du_faucon_noir/critique/57756
Reste à comprendre celui qui m'aura lu pourquoi une telle note. La réponse est dans le titre.