Remake argentin d’un film argentin de 1976 intitulé Los Muchachos de antes no usaban arsénico, alors réalisé par José Martínez Suárez, El Cuento de las comadrejas compose une galerie de personnages hauts en couleur, disposant chacun d’un caractère spécifique lié à la profession autrefois exercée : l’une, ancienne gloire du cinéma, se complaît dans un faste illusoire, un autre subit ses méchancetés cloué dans un fauteuil roulant, un autre encore brille par son sarcasme, un dernier se prend de passion pour les « bébêtes », classification incertaine à laquelle viennent s’ajouter les deux promoteurs immobiliers. La comédie de caractères se double ainsi d’une comédie de mœurs opposant deux générations définies chacune par un rapport au monde et des valeurs spécifiques, singularités que le réalisateur également coscénariste utilise tel un miroir dans lequel se réfléchit la permanence du vice : l’inhumanité froide des bonimenteurs coïncide avec les fantômes laissés trop longtemps dans le placard de gens a priori irréprochables, vivant dans une retraite paisible. Le choc de deux âges fait voler en éclats ces apparences, interrompt une mise en scène réitérée depuis longtemps pour lui en substituer une autre, contraignant par la même occasion les anciens artistes à reprendre du service. Mis en scène avec précision, le long métrage se suit avec un réel plaisir et cultive les transgressions du quatrième mur de façon à accentuer ce theatrum mundi sur la scène duquel chaque être se produit. La générosité de l’interprétation contribue également à notre attachement à ces personnages tout à la fois affreux et adorables, profondément humains en somme.