Accompagné du scénariste Richard Price (The Wire, 2002), Martin Scorsese nous raconte une tranche de vie d'Eddie Felson, un personnage crée en 1950 par l'auteur Walter Tevis et déjà joué par Paul Newman en 1961 dans le sublissime The Hustler, de Robert Rossen. En réalité, ce personnage est inspiré de la vie de "Fast Eddie Parker'' (1932-2001), qui fut véritablement un joueur de billard professionnel, et qui déclara à l'époque qu'il ne souhaitait pas être associé à cette fiction pour ne pas griller sa couverture (''The movie would've blown my cover by the time I got to the next town'') ! Réalisé après le coup de maître Raging Bull (1980), Martin Scorsese s'empare sans difficultés de l'univers du billard, traité avec soin et minutie : le jargon, les postures, les plans séquences et multiples prises de vue nous mettent au tapis d'entrée et contribuent grandement au réalisme du film.

Avec une triplette de compète (Mary Elizabeth Mastrantonio - Paul Newman - Tom Cruise), l'intrigue déroule son jeu coup après coup en trois bandes. En vétéran de l'arnaque (The Sting, de George Roy Hill ,1973), Paul Newman aka le grand faisandier, tente d'apprendre le métier au talentueux Vincent (Tom Cruise) d'une impressionnante maturité à presque 24 ans. L'arnaque utilisée dite 'des deux frères et un étranger' est bien rodée, à condition d'être jouée à la perfection. Il apparaît alors surprenant que ce réalisateur perfectionniste n'est pas creusé davantage les tours d'arnaque et placé le focus sur les conflits entre ces deux séducteurs nés. Selon moi, cela limite grandement l'immersion dans le film : Serait-ce par précaution, que les meilleurs tours du ''Fast Eddie Parker'' ne sont pas montrés dans le film, afin de laisser au vrai faisandier, une longueur d'avance chez le prochain bookmaker ? Frustrant...

Bien que le film se regarde très agréablement, avec un tel casting et de tels maîtres derrière la camera, on était en droit d'attendre quelque chose de plus épique, surtout suite au préquel si brillant de Rossen dès 1961. De chambre d’hôtel en bar de nuit, la tournée des conquistadors de la balle 9 rate souvent le trou. La bande-son orientée Jazz, Blues, Rock, rehausse un peu les ambiances enfumées et alcoolisées des salles de jeu. Mais pour les véritables amateurs d'escroqueries, l'intrigue offre peu de rebondissement ou de retournement de situation...

Alors que la tension semble enfin monter d'un cran au grand tournoi, et que le scénariste réussit habilement à nous surprendre, c'est déjà le dénouement et ce dernier n'offre pas d'émotion singulière - si ce n'est l'orgueil piqué du maître dépassé par son élève, tous deux restant des gamins insatiables et impossibles à départager, tandis que Carmen (Mary Elizabeth Mastrantonio) désespère et se méfie de ces deux lovers qui perdent la boule. Cette dernière scène n'arrive d'ailleurs pas à clore le film : elle relance le match sans engager de nouvel enjeu, pire le faisant revenir au début du film... comme une fausse queue entraînant fin de possession et pénalité :(

>>> La couleur de l'argent reste un Scorsese honorable, soigné sur le plan technique et boosté par l'omniprésence de grands talents réunis. La pélicule nous permet surtout d'apprécier un bon Paul Newman hyper-classe dans l'un de ses derniers grands films, pour lequel il obtiendra - puisqu'il ne lui avait pas encore été attribué - le salutaire Oscar du meilleur acteur 1987... <<<

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le 1 mars 2023

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