"Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !" Bruce Lee
Jamais je n'aurais pensé que je pourrais voir un jour un film de kung-fu tendance extrême gauche. D'ailleurs, jamais je n'aurais pu penser que quelqu'un de suffisamment fou en aurait eu l'idée.
Le fou en question : René Viénet. Ce monsieur a eu la folle idée d'importer en France un obscur nanar hong-kongais puis de le détourner, et cela bien avant La Classe Américaine. Quel hipster, ce René !
Le pitch : les prolétaires s'entraînent à casser des briques grâce à leur dialectique et leur subjectivité radicale. Mais les terribles bureaucrates, à l'aide de leurs sociologues, de leurs psychiatres, de leurs Foucault et de leurs Lacan (voire même un structuraliste), sont toujours là pour opprimer cette classe, tout en essayant de la convertir à sa cause. Heureusement pour les prolétaires, ils ont parmi eux un homme qui a suffisamment lu pour maîtriser la dialectique et mettre fin aux agissements de l'Etat.
Vous l'aurez compris, le film se base quand même sur des notions politiques bien précises. En l'occurrence, c'est une œuvre situationniste. Pour résumer, le situationnisme est une tendance de l'extrême gauche assez proche du communisme sur bien des points, qui lutte contre les sociétés marchandes et le capitalisme des États, l'aliénation des hommes d'une quelconque manière (que ce soit par le travail, par les respect de conventions sociales)... Viénet n'hésite pas à s'en prendre également aux syndicats, pour une raison qui m'échappe un peu (NB : en fait, les situationnistes voient d'un très mauvais oeil les organisations de toute sorte, qui formeraient l'embryon de la bureaucratie) et dont je pense que je ne serai pas vraiment en accord d'ailleurs. Les références sont très pointues et pour tout comprendre, il faut soit avoir une vaste culture politique, soit baigner dans ce milieu.
Ce qui est un peu dommage d'ailleurs. Le film est extrêmement drôle, le décalage entre l'action et les dialogues est juste hilarant, les lignes les plus célèbres restant : "J'attends le matin du grand soir. Surtout le grand soir" ou "Comme le dit Lénine, on a beau être la classe dominante, on est dans la merde". Bien que le film soit orienté, les deux partis (prolétaires et bureaucrates) se font charier. Il n'y a donc objectivement pas de message politique à faire passer, bien au contraire : c'est de la pure galéjade, mais le problème, c'est que ça reste au niveau de la private joke entre communistes.
Au terme du visionnage, une question reste en suspens : pourquoi est-il référencé sur Nanarland ? Qu'on aime ou qu'on n'aime pas, il ne se prend pas une seule seconde au sérieux. Alors okay, le film de base est merdique, mais ça s'arrête là. L'idée qui a motivé ce film est complètement barrée, tout comme les dialogues. En plus, Patrick Dewaere fait une apparition vocale à la fin, alors...
Un film que je recommande énormément, surtout aux camarades !