La Domination Masculine, documentaire de Patric Jean, entend nous prouver qu'au XXIe siècle, l'égalité hommes / femmes n'est toujours pas acquise, et que certainEs sont encore (ou retournent) au stade du mâle protecteur et dominateur et de la femme fragile et soumise.
J'avoue être assez mitigée sur le rendu final de ce documentaire...
Il y a effectivement des séquences d'anthologie, comme cette visite de la Grande Récré par un vendeur qui définit les jouets « pour garçons » et les jouets « pour filles » d'une manière atrocement sexiste, et qui lui parait la plus naturelle du monde.
L'analyse qui met en lumière le sexisme au sein des livres pour enfant est également édifiante, tout comme certaines séquences montrant des domaines moins médiatisés (un salon de l'automobile où une femme présente une voiture pour les femmes : « modulable, pour les activités plurielles des femmes : faire les courses, aller chercher les enfants... »)
On atteint même le point Godwin face à ces hommes qui comparent le féminisme au nazisme, à un crime contre l'humanité, et étayent leur thèse en abusant de l'essentialisme, alors qu'il est plutôt largement admis aujourd'hui que le genre est une construction sociale, et non une propriété biologique.
Cependant, j'ai l'impression que le documentaire dépasse rarement la notion de « séquence » : on nous présente de cours morceaux d'interviews, des bribes de phrases, les interlocuteurs ne sont jamais présentés. Parfois le contexte du tournage donne sufisamment d'informations, et l'image parle d'elle même, mais, par exemple, pour ces hommes qui qualifient le féminisme de nazisme, on aurait aimé savoir quelle position occupent-ils dans l'espace social, quel pouvoir ont-ils, de quelle popularité / médiatisation bénéficient ils... Mais rien de tout cela ne nous est montré. J'ai eu trop souvent l'impression que des mots et des images m'étaient jetés en pâture sans analyse particulière.
On compte également de nombreux plans purement illustratifs qui tour à tour viennent souligner sans cesse les mêmes idées, dans une rapport plutôt redondant.
Je me permet également de faire un aparté sur un « détail » qui m'a interpellée :
Peut être que je suis en train de faire un abus de Cultural Studies ces derniers temps, mais toujours est il que l'omniprésence « du blanc » dans ce film m'a marquée. Après avoir rapidement étudié Bell Hooks, qui, dès le début des années 80 (il me semble) reproche au féminisme de mettre à l'écart les femmes de couleur, j'ai été interpellée par la constitution des témoins de ce documentaire, qui sont tous dans la même tranche d'âge (35/50 ans à peu près) et tou-te-s blanch-e-s. Cela me parait rendre le témoignage beaucoup moins « universel » qu'il ne prétend l'être au départ.
Je ressors donc de la séance avec un sentiment de frustration, voire d'inachevé. J'ai l'impression que le film contient suffisamment de témoignages et de séquences clés pour amorcer un débat et provoquer une prise de conscience, cependant, le montage tendant vers l'addition, et le manque d'informations, d'analyses, donne un aspect fourre-tout qui, à mon sens, nous éloigne du propos du film.
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