L'enka: un plat qui se mange froid.
La voilà mon introduction au cinéma d’exploitation nippon des 70’s, je l’ai pas volée —non, je l’ai achetée. Et tout ça pour voir l’histoire d’une femme décidée à tous leur faire payer.
Ouais parce que les bons comptes font les bons Nami (jeu de mot contextuel, vous avez qu’à regarder le film).
Regarder un film d’exploitation c’est un peu comme se faire exploiter ; alors évidemment quand on ressort avec l’impression de ne pas s’être fait avoir ça fait du bien. J’ai très franchement beaucoup aimé ce premier opus mais par esprit de réserve je ne lui accorderai pas plus que ce très honorable 7, ne possèdant pas suffisamment de recul par rapport à l’ensemble de la saga.
Imaginez que je tombe sur le cul en voyant le deuxième…
Non on se fait pas avoir en regardant "Joshuu 701-gô: Sasori ". On veut du seventies, on veut de la B.O racée, on veut de la vengeance, on veut du W.I.P, on veut du style, on veut du concept, quoi. Et on est servi, bien qu’on lise ça et là que le deuxième épisode est plus généreux (d'où ma réserve).
On a de la péloche qui bave, du grain qui suinte, des couleurs de scopitone délavées. On a du spleen à la Nancy Sinatra (ô superbe Urami Bushi chanté par Meiko Kaji !), du son psychédélique, de la femme bafouée devenue instrument de vengeance, du regard glacial, de la détermination silencieuse et fatale. On a de la garce, de la codétenue pourrie, de l’homo érotisme, du gardien sadique, de la haine et de la jalousie puis de l’admiration devant cette prisonnière transformée en idée faite femme. Et on a la promesse que tout ceci ne s’arrêtera pas là (5 films suivront).
Mais avant tout il y a une interprète, un visage, un regard, une silhouette, une voix : Meiko Kaji, poupée japonaise au minois à croquer, capable de lancer des regards à défriser Sadako sur place, quasi muette, immuable, fragile et fatale, fantastique.
Et dire qu’elle pourrait être ma grand-mère.
Pour revenir sur terre, j’ai été agréablement surpris par la réalisation. Je m’attendais a priori, vu le genre, à quelque chose d’un peu torché, bancal, maladroit, voire kitsh. Honnêtement il y a un peu de ça, mais la plupart du temps on est séduit et accroché par un subtil mélange de sobriété de savoir faire, de plan ou mouvements assez modernes, et de petites fulgurances arty qui laisse une agréable impression de liberté relative à l’ensemble; sensation plutôt salvatrice pour l’audience. J’attends donc de voir avec impatience ce que me réserve Ito pour la suite des réjouissances.
En bonus quelques bonnes idées de photographie et de cadrage ajoutées à de petites insolences du genre représenter le drapeau nippon par la tâche de sang d’un dépucelage sur un linge blanc immaculé. Chouettes aussi les éléments de mise en scène empruntés au théâtre.
Inutile de s’étendre, je crois que je ne pouvais pas rêver mieux que cette histoire de femme bafouée, passant de la pureté des sentiments et du corps à la corruption de l’âme ; faisant de son corps un réceptacle de haine qu’elle remplira jusqu’à ce que le sang qui devait couler coule. Je crois que je ne pouvais pas rêver mieux que ce premier film d’exploitation nippon 70’s bien ficelé, avec des femmes qui ont des couilles comme je les aime (ne surtout pas déformer ces propos, je vous vois venir), efficace, accrocheur et plein de personnalité.
Xena, Buffy, allez vous faire épiler ; maintenant il y a Sasori.