Revoir un film en noir et blanc de cette époque, et en plus un western, met le spectateur dans une atmosphère particulière. J'étais plus dubitatif sur Joel Mc Crea, l'acteur principal, mais son jeu plus taiseux et moins charismatique qu'un John Wayne ( dont il a du être dans l'ombre une partie de sa carrière), est intéressant. En effet, l'action sur un film comme La Fille du désert s'en trouve moins codifiée et l'allure plus en retrait du protagoniste Wes Mc Queen est en adéquation avec la mécanique plus futée du film axée sur la dualité. Dualité de cet anti-héros partagé entre ses valeurs d'homme bon et sa condition de hors-la-loi par nécessité. Dualité entre la fausse oie blanche (vraiment vénale) et la fausse danseuse de saloon ( Colorado ,alias Carolina en VF, qui montrera son vrai caractère au delà de sa condition elle aussi). Raoul Walsh a su jouer des contrastes et de scènes très savoureuses pour creuser les psychés contrariées mais ô combien intéressantes de cette homme et de cette femme qui finissent par s'aimer aux pires moments. Un des tempos autour de cette mise à prix sur la tête de Mc Queen pour récupérer l'argent de l'état en devient même secondaire car l'essentiel n'est pas ici. Génial pour un western des années 1940, car juste deux décennies après l'avènement des films parlants.
Même si le dénouement est fait de quelques longueurs, l'intensité des dernières scènes dans ces canyons de l'Ouest filmés avec maestria est elle aussi remarquable. Et même si le devenir de Mc Queen et Carolina est funeste ( en total décalage avec les happy ending du western made in Hollywood), la morale sera sauvée dans un style qui n'aurait pas déplu au couple. La boucle est bouclée et ce western pas comme les autres aura marqué les esprits de ses dissonances.