Un de ces documentaires palpitants qui rendent heureux d'être de notre époque, en dépit de toutes les vicissitudes contemporaines, parce que, pendant que des abrutis dépensent des milliards en armes lourdes, les scientifiques, eux, font avancer les connaissances de notre espèce. On peut se dire que, si par miracle on échappe à la destruction globale, on aura de quoi se concentrer sur une évolution positive liée en partie à la reconstitution de nos erreurs passées... La guerre de Troie compte parmi elles, dans l'histoire universelle de l'infamie et des massacres de masse, mais elle a eu la chance d'être sublimée par un artiste (ou des artistes, la question sembler rester entière) majeur. S'il reste quelques fleurs pollinisées dans notre futur proche, on pourra toujours relire Homère et se retourner sur l'histoire des hommes avec effroi et sidération, pour chanter la chance qu'on aura eue de sortir indemnes du règne de la barbarie... En tout cas, les archéologues font avancer l'histoire et ce documentaire fait le point sur leurs découvertes en Turquie, sur un site qu'on peut désormais considérer officiellement comme celui du déroulement des exploits millénaires d'Achille et autres Mirmidons. Le sujet est ardu, car la colline en question a vu se superposer, au cours des siècles, plusieurs périodes de peuplement. Qu'on se rassure, certains d'entre nous, pas les plus neuneus, savent reconnaître un âge historique d'un simple coup d'oeil à un tesson de poterie poussiéreux, exploit que j'assimile à la lecture verticale des pianistes, capables de lire de la clé de fa et de la clé de sol sur deux portées d'un seul coup d'oeil. Nous sommes quand même une sacrée espèce ! Ça fait du bien de se le faire rappeler parfois, entre deux publicités avilissantes pour des produits toxiques. Bref, une vraie cure d'optimisme (nuancé) que cette méditation sur la vanité des hommes, l'ingéniosité des architectes antiques, l'adresse des artisans troyens, la barbarie intemporelle des guerriers et le génie des poètes ! Quand tous les soldats sont morts depuis 3000 ans, restent les vers immortels des aèdes et les pinceaux délicats des chercheurs agenouillés avec humilité et détermination sur le sol.