Je regretterai toujours de ne pas avoir pu voir ce film au cinéma, me rattrapant avec un dvd rendant à peine justice au film. Mais avec le Bluray, j'ai pu récemment le revoir et réhausser encore, si c'était possible, l'opinion que j'ai de ce qui, à la base, était sencé n'être qu'un blockbuster pété de thunes et bourré d'effets spéciaux.
Comment décrire l'effet que ce film a eu sur moi ? Grand amateur de films d'horreur, je ne pensais pas me retrouver devant ce faux nez de film à grand spectacle, pour ressentir au final une terreur diffuse, glaçante, face aux agissements des tripodes extra-terrestres. Une bonne part de la réussite du film tient dans leur design, machines de mort élégantes dans leur déplacement, des gigantesques ballerines de mort.
Une séquence donne le ton de ce que sera tout le film, la magistrale scène de l'intersection. D'abord, il y a des craquelures dans le sol, semblables à un tremblement de terre, c'est le chaos, les gens courent dans tous les coins, et l'église du carrefour n'y résistera pas, le clocher s'effondrera, symbolisant le vain espoir que les hommes placent dans la religion.
La première fois que le tripode sort de terre, Spielberg nous donne une véritable leçon de mise en scène qui met à l'amende tous les petits jeunots, jouant avec les reflets dans les vitres des voitures ou des bâtiments, via l'écran d'un portable, (à ce point là, je n'hésite pas à parler de chorégraphie de l'apocalypse). J'étais tétanisé d'angoisse en voyant cette énorme machine s'élever dans les airs le long de ses tentacules souples et étirés. Grande réussite du sound design, le son de corne venant du tripode annonce littéralement la mort de l'humanité. Et quand les lasers du tripode crachent leur rayon de mort, la débandade qui s'en suit est absolument mémorable.
Toujours filmé à hauteur d'homme, cette menace nous rend totalement impuissant, littéralement comme des insectes écrasés par une puissance supérieure. Et ce sentiment d'impuissance, Spielberg nous le fait vivre viscéralement, aidé par des effets spéciaux de pointe, et un John Williams qui compose en cet instant l'une de ses partition les plus anxiogènes et crépusculaires.
Le ( faux ?) happy end n'y changera rien, l'humanité aura pris conscience de sa fragilité, et de sa réelle place dans l'univers. La bonne trouvaille est d'avoir intégré le prologue et l'épilogue de H.G. Wells, réactualisé et dit par Morgan Freeman. D'emblée, on est dans le ton et l'intention, rendant ce film finalement beaucoup plus proche du roman que le film de Byron Haskin.
À ceux qui ont massacré ce que je n'hésite pas à qualifier de chef d'oeuvre, revoyez La Guerre Des Mondes, ressentez la mise en scène de malade, certains plans séquence comme celui de l'autoroute, où la caméra tourne autour de la voiture, rentre dans l'habitacle, en ressort, et cela de façon totalement fluide et naturelle, alors que beaucoup d'effets spéciaux ont été nécessaires.
Beaucoup de gens se sont extasiés sur la mise en scène de "Les Fils de L'homme" (à raison, ceci dit), alors pourquoi, quand c'est tonton Spielberg qui vous met une magistrale baffe dans la gueule, vous n'y voyez qu'un énième blockbuster, arcqueboutés que vous êtes sur la réputation de réalisateur qui ne saurait faire un tel film, n'est-ce pas ????