Comme dans La Cantatrice chauve (où il n'y a pas de cantatrice, et elle n'est même pas chauve), dans La Jeunesse de la bête, il n'y a pas de bête et elle n'est même pas jeune. A ce moment de sa carrière, Seijun Suzuki produit des films à la pelle sur commande, et les studios utilisent des mots clefs pour attirer les foules et gagner du pognon. Ca peut en dire beaucoup sur la qualité du film... Alors pourquoi un regarder un film de série B plus de soixante ans après sa sortie ?

Assurément, ni pour le scénario, très attendu malgré un petit retournement de situation pas dégueulasse à la fin, ni pour le talent des acteurs et des actrices (même si l'acteur principal au visage si mémorable, Jô Shishido, frappe les esprits). C'est pro, mais sans plus. Pour rappel : un nouveau venu dans le monde des yakuzas tabasse presque tout le monde, dans l'espoir de retrouver et punir les coupables du meurtre de son mentor. C'est typiquement un personnage de berserker, qui écrase tout sur son chemin, en utilisant aussi sa cervelle pour liguer ses ennemis contre eux-mêmes. On est dans la veine d'un Yojimbo / Sanjuro, et on retrouvera les mêmes histoires dans plusieurs westerns (L'Homme des hautes pleines) et Tarantino (Kill Bill). Et c'est d'ailleurs pour ces influences qu'on regarde encore ce film. Seijun Suzuki, dont le talent sera reconnu bien plus tard, commence déjà à imprimer son style contre les attentes de son studio, ce qui lui vaudra d'être banni quelques années plus tard. Des couleurs flash, de la violence trash, de l'action à volonté, des larmes et du sang, des gangsters chelous, de l'humour bien dosé : le film est incroyablement moderne. Alors on excuse le peu de subtilité du scénario puisque Seijun Suzuki le transforme en un spectacle plaisant et divertissant.

Samji
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de l'âge d'or du cinéma japonais

Créée

le 8 juin 2024

Critique lue 6 fois

1 j'aime

Samji

Écrit par

Critique lue 6 fois

1

D'autres avis sur La Jeunesse de la bête

La Jeunesse de la bête
Docteur_Jivago
7

L'Infiltré

La Jeunesse de la Bête se révèle être une oeuvre particulière, où un scénario assez confus déroute presque autant que la mise en scène est sublime à bien des égards. Pourtant, le scénario débute...

le 21 août 2020

15 j'aime

La Jeunesse de la bête
Torpenn
6

Suzuki veut gagner des moignons

Des années que j'attendais ça, mon dépucelage Suzuki qu'un sort malin m'empêchait depuis longtemps de jeter aux orties... Conditions optimales : un hôte et des convives d'exception, des raviolis...

le 17 juin 2011

14 j'aime

12

La Jeunesse de la bête
drélium
8

Critique de La Jeunesse de la bête par drélium

C'est presque l'opposé de La marque du tueur. Cette fois-ci, on a droit à un scénario très ficelé, énigmatique au possible, avec retournements de chemise à tous les étages, qui ne se révèle...

le 17 juin 2011

13 j'aime

9

Du même critique

Le mal n'existe pas
Samji
5

Dersou Ouzala chez les cinglés

J'étais enthousiaste à l'idée d'aller voir Le mal n'existe pas : un film japonais, contemplatif et esthétique, un conte écologique, le tout par Ryusuke Hamaguchi, le réalisateur de Drive my car, un...

le 13 avr. 2024

26 j'aime

4

J'ai perdu mon corps
Samji
4

Passez votre che-main

J'ai perdu mon corps est le film typique d'une fausse poésie. En enlevant la seule originalité du film, qui consiste dans les pérégrinations d'une main coupée à Paris pour retrouver son propriétaire,...

le 20 févr. 2023

10 j'aime

Le Comte de Monte-Cristo
Samji
8

Le cinéma est un plat qui se mange chaud

Je suis allé voir ce film presque par hasard. Il faisait 40 degrés à Paris, j'ai pensé à aller au cinéma pour me rafraîchir les idées, j'ai choisi le film diffusé le plus long : Le Comte de...

le 14 août 2024

4 j'aime