Musique!
Vous arrive-t-il de stresser avant le début d'une séance ? Vous arrive-t-il d'avoir peur de ne pas aimer, peur d'être déçu ? C'était le cas avant la projection de La La Land. Avec toutes les récompenses et les avis dithyrambiques que le film a reçu, il est normal d'appréhender le film. Car souvent, un trop plein d'avis positifs entraîne une déception derrière. Certes, il reste des exceptions, mais j'ai appris à me méfier des critiques positives. Et pourtant, rien que la scène d'introduction me réconforte : je VAIS aimer.
Je n'aime pas les comédies musicales. Du moins j'ai beaucoup de mal avec elles. Quand je vois un film, j'ai besoin d'entrer dedans, d'être happé par l'univers proposé et par conséquent d'avoir en face de moi un métrage réaliste. Et quand des acteurs soudainement se mettent à chanter dans des chorégraphies délirantes, j'ai du mal et ça me fait sortir du film. Alors il était difficile pour moi de penser qu'un jour j'attendrai de pied ferme une pure comédie musicale. Au point de stresser avant le début de la séance. Mais La La Land n'est pas une comédie musicale ordinaire, elle les dépasse aisément, en s'imprégnant de tout ce qu'il y a de bon en elles, sans prendre avec elles leurs défauts.
Car oui, rien que la scène d'introduction nous fait comprendre qu'au-delà de la comédie musicale visionnée, nous nous apprêtons à visionner un film riche dans sa mise en scène et dans sa photographie. Comment ne pas tomber amoureux d'un plan séquence long de quelques minutes (un pur orgasme visuel si vous aimez comme moi les plan séquences) rythmé par une musique envoûtante, des paroles amusantes et une chorégraphie très jolie visuellement, pleine de couleurs et de joie ? Il faut dire que Damien Chazelle avait déjà montré tout son talent et son ingéniosité dans Whiplash, son film oscarisé qui nous donnait déjà la passion pour la musique du cinéaste. Et ici tout est beau, la réalisation est méticuleuse et renversante, en appuyant sur des jeux de lumière très réussis qui se focalisent tour à tour sur les deux protagonistes principaux : Mia (Emma Stone) et Sebastien (Ryan Gosling).
Et dire que les deux acteurs ne méritent par leur Golden Globe serait pure folie. Les deux personnages de l'histoire devaient à la base être interprétés par Emma Watson et Miles Teller mais après avoir vu le film, on s'imagine difficilement comment il aurait pu en être autrement, tant Emma Stone s'accapare le rôle à merveille. La caméra dévore son visage, son corps, la fixant pendant des secondes, des minutes, comme si chaque moment était intemporel. Et Stone se donne à fond dans le film, et c'est incroyable parce qu'elle nous transmet chaque émotion. Elle passe des rires aux larmes, de la passion à la tristesse rien qu'en quelques secondes, et tout se voit sur son visage, et c'est beau. Elle accapare chaque scène, on ne voit plus qu'elle. Même Ryan Gosling paraît un peu en retrait. Néanmoins, Gosling reste comme à son habitude un très bon acteur, au charisme révélateur. Le duo fonctionne à merveille, et leurs scènes musicales sont alors certains des moments les plus beaux du film, où j'ai eu l'envie irrésistible plusieurs fois de me lever de mon siège, de chanter avec eux et d'être tout simplement avec eux.
Damien Chazelle nous livre un film similaire à son Whiplash dans la mesure où il nous délivre une passion totale de la musique. Toutefois, là où la violence régnait dans Whiplash, il ne reste que joie et passion dans La La Land, même s'il discute aussi de sujets sérieux comme l'évolution de la musique, l'ambition des rêves d'avenir... La La Land reste peut être un peu trop linéaire ; c'est facile de savoir ce qui va se passer. Mais cela enlève-t-il un quelconque plaisir ? Pas le moindre.
Le nouveau Chazelle est une comédie musicale romantique plus que sympathique : elle est touchante de sincérité, elle est juste dans ses propos et elle filme grandiosement ses acteurs. Difficile de ne pas accrocher. Et dans les périodes sombres actuelles que nous vivons (aussi bien réelles que dans le cinéma -avec tous les reboots hollywoodiens incessants-), il fait du bien de voir un film original, gai, et différent de ce qu'on a l'habitude de voir ces derniers temps. Une réussite.