Whiplash était un film monumental, je me devais de voir la prochaine réalisation de Damien Chazelle… même si autrement, la bande-annonce de La la land ne m’avait pas fait envie, et que je ne suis pas adepte des comédies musicales. Mais à voir les avis élogieux de partout, je me suis déplacé en salles, pour la première fois depuis un bon moment.
Au vu de la première séquence, j’ai craint que mon avis rejoigne celui de quelques personnes qui m’avaient averti quant à leurs réserves, disant plus ou moins que La la land est de ces films qui brillent par la forme mais dont le fond laisse à désirer.
Pour moi cette intro est une erreur, elle est représentative de ce qui me déplaît dans les comédies musicales : ces numéros qui n’ont aucune raison d’être, et qui ne racontent rien. Chazelle voulait certainement en mettre plein la vue d’emblée, mais contrairement aux autres séquences chantées du film, la première ne participe nullement au récit, c’est juste un groupe d’inconnus qui décident de pousser la chansonnette à propos d’une histoire d’amour… ce qui, en plus de ça, rend ce numéro très niais.
Par contre, d’un point de vue technique et logistique, c’est un tour de force.
On ne peut qu’admirer le travail formel de La la land, il y a des idées de mise en scène géniales dont la mise en application est bluffante, la photographie est éblouissante, et on voit que l’esthétique est réfléchie depuis le choix des décors à la composition des couleurs des accessoires et des costumes.
Certes, le point de départ de l’intrigue est des plus classiques : Mia, une actrice en herbe, essaye de se démener à Hollywood à la recherche d’un rôle, et elle croise le chemin de Sebastian, un pianiste fauché qui galère tout autant, alors qu’il rêve d’avoir son propre club de jazz. Leur relation part du mauvais pied mais ils finissent par s’aimer.
Rien de révolutionnaire jusque là. Le rapport entre les deux protagonistes est d’ailleurs à peine plus approfondi que dans beaucoup de films à l’eau de rose… et pourtant, il y a des séquences sacrément romantiques qui font que cette union m’a un peu plus touché.
La justesse des acteurs y est aussi sûrement pour quelques chose ; bien que déjà fan d’Emma Stone, je trouve que dans La la land elle a encore plus l’occasion de démontrer la qualité de son jeu. Et puis l’actrice est ravissante, d’un charme hypnotisant ; ce moment où elle rit et danse sur "I ran", en particulier, m’a fait craquer.
Parfois, c’est simplement la mise en scène, qui apporte un renouveau à des scènes déjà vues ; ce moment, devenu cliché, où la fille quitte son copain actuel pour aller rejoindre un autre, cette fois elle est amorcée par une jolie idée qui apporte une légère différence (le morceau de jazz entendu au restaurant).
Je trouve admirable comme Chazelle arrive à faire passer des idées par son usage de la musique.
Et après Whiplash, force est de constater que le cinéaste se sert du mariage entre les mondes du cinéma et de la musique pour livrer un propos captivant. Whiplash parlait de l’acharnement au travail et faisait se poser des questions sur le bien-fondé des méthodes d’un de ses personnages despotiques, qui visait à obtenir la perfection.
Dans La la land, Chazelle dresse une description amusante de la superficialité d’Hollywood et des gens qu’on y trouve ; ceux qui viennent pour y concrétiser leurs rêves se heurtent à la réalité : non seulement la difficulté à percer, mais aussi la médiocrité des projets proposés. (mise en abyme, d’une certaine façon, pour un film comme La la land qui se démarque de la bouillie qu’on nous sert habituellement)
Les deux héros semblent devoir choisir entre faire des compromis ou faire ce qu’ils aiment, gagner leur vie ou poursuivre leurs rêves, opter pour une situation stable ou tenter sa chance sans garantie de réussir.
Les drames vécus par Seb et Mia m’ont été poignants parce que c’était des dilemmes en lesquels je pouvais me reconnaître. Ce qui est d’autant plus tragique c’est que les deux personnages ne croient pas en leur propre capacité à réussir, mais chacun pousse l’autre à concrétiser ses rêves. Si ça, c’est pas de l’amour…
Et pourtant, c'est de cela-même que naît leur discorde.
Alors que j’avais commencé le film avec de l’appréhension, j’ai été peu à peu conquis. Même les chansons, que je ne trouvais pas plus marquantes que ça, m’ont plu davantage au fil du long-métrage. Je sens que "City of stars" et sa musique envoûtante va me rester en tête pendant plusieurs jours.
La la land finit en apothéose, avec ce dernier numéro musical magnifiquement touchant. A la fois une séquence dramatique, et une ode au pouvoir des rêves, de l’art, et de l’imagination.
"Here’s to the ones who dream".