Un nouveau pacte

Déception un brin attendue de mon côté, car cette relecture du récit faustien ressemble en tous points à celle d'Alice au pays des merveilles dans "Alice" que Jan Švankmajer avait réalisée quelques années auparavant. Un matériau de base extrêmement riche (ici à la fois hérité de Christopher Marlowe et de Goethe), un génie artisanal dans la manipulation des marionnettes et dans l'animation de la pâte à modeler, un décorum globalement inquiétant, lunaire, étrange... Mais malheureusement, encore une fois, je trouve que l'ensemble manque de liant et apparaît comme trop décousu à mon goût. Švankmajer restera pour moi un excellent réalisateur de courts-métrages sans parvenir à transformer l'essai du côté du long, jusqu'à preuve du contraire.

Ici le cinéaste tchèque mêle plusieurs mondes à plusieurs niveaux, tout d'abord les prises de vue réelles aux séquences animées, ensuite l'univers d'un homme ordinaire à Prague se retrouvant confronté à un théâtre particulièrement inquiétant mettant en scène une représentation de la légende de Faust. Après une longue introduction sans paroles sous la forme de déambulation et de précipités surréalistes plus ou moins intelligibles (une poule bizarre, une carte bizarre, des gens bizarres), il se retrouve contraint d'endosser le rôle de Faust, de pactiser avec le diable, etc.

On atteint clairement mes limites en matière de tolérance au confus (du côté du bizarre ça va, il y avait encore beaucoup de marge), et au final je me suis très vite paumé en chemin dans le délire. La narration est quand même très sèche, avec une petite inversion dans les rôles puisque c'est plutôt Faust qui cherche le diable et non l'inverse. Ça n'empêche en rien d'apprécier l'imagination débordante de chaque scène ou presque, avec sa dose d'absurde et de kafkaïen, avec son ambiance souvent lugubre sans oublier de manier un humour bienvenu. En tous cas, un détachement et une froideur dans l’ensemble, avec un petit côté saynètes mises bout-à-bout, qui freine beaucoup l'implication.