Ermano Olmi filme une fable alternant le réalisme (et la mise en évidence des dérives de notre société), toujours poétique et le conte fantastique, avec une émotion parfois bien douloureuse. Ce rajoute à la nostalgie, cette idée de "temps révolus", assez forte chez ce cinéaste.
Un homme bienveillant offre à un clochard la somme de 200 francs. Il devra seulement rembourser cette somme à Thérèse de Lisieux à l'église Sainte Marie des Batignolles. Ce prêt inespéré va conduire Andreas à une série de rencontres mêlant souvenirs, rêves, fantasmes et réalité dans un Paris fantasmagorique. De cette chance inespérée et quelque peu "magique", Andréas continuera à bénéficier de petits miracles, tout en étant toujours ralenti par divers événements, impromptus ou voulus, l'éloignant de ce qui pourrait lui permettre de se reprendre en main, et de changer sa vie bien misérable.
Ancien mineur de Pologne, ayant fuit son pays suite à un drame, notre fabuleux clochard, naviguera sans cesse dans le brouillard de ses vapeurs d'alcool, cherchant à s'affranchir de ses démons par quelques éclairs de lucidité.
Les cadrages, la luminosité nous transportent dans un sorte de conte merveilleux, tout en menus détails où le drame est à chaque plan. Les décors et les lieux sont emprunts de forte nostalgie et on accompagne notre héros perdu dans ces ruelles sombres et ces cafés accueillants, au charme passé. De sa rencontre avec une ancienne amie, Karoline (Sophie Segalen), le passé perdu ressurgira pour finir d'appuyer le chemin difficile d'Andréas. De sa rencontre avec Gaby (sandrine Dumas) il en ressortira irrémédiablement une perte à venir, même si notre beau clochard navigue dans l'adversité avec une certaine aisance.
Pourtant, cette quête de rédemption est pleine d'optimisme et Ermano Olmi a su trouver dans Rutger Hauer le personnage hors du temps de ce drame, qui ici a l'un des plus beaux rôles de sa carrière. Lion d'or à Venise en 1988.
Tiré du livre éponyme de J.Roth, écrit en 1939, exilé à Paris au début des années trente, et qui lui-même termina sa vie dans la misère, seul et oublié.