On ne présente plus Georges Méliès, son apport au 7ème art est inestimable, lui qui en fut un des pionniers et qui placa l'invention des frères Lumières dans une optique de divertissement. La Magie Méliès a bien compris cela, le documentaire va surtout s'intéresser aux méthodes de ce génie ainsi que son apport et ce qu'était Méliès à l'époque.
C'est là que ce documentaire est réellement remarquable, dans sa façon de présenter l'homme dans son époque, mais de le faire par rapport à son art et ses méthodes, oscillant bien entre les différents sujets et époques. On découvre ses inspirations, remontant notamment à un voyage à Londres dans les années 1880, sa jeunesse et comment il est arrivée dans le cinéma, sa façon de faire, sa vie, son rapport avec les productions, mais aussi la concurrence, le contexte de l'époque jusqu'à son "déclin" puis sa fin de vie, en vendeur de confiserie avec sa femme, qu'il considéra comme un enfer, voire même une prison où il était privé de liberté et tombé dans l'oubli avant qu'un journaliste ne le reconnaisse. Jacques Mény propose un vrai voyage dans le temps où, à l'aide, entre autres, de la musique et des images, il nous immerge totalement au coeur de ces années-là et au côté de Méliès.
L'aspect chronologique est celui le moins important du récit (qui n'hésite pas, avec fluidité, à faire des bonds entre les époques) qui se concentre réellement sur ses années fastes, soit entre la fin des années 1890 jusqu'à, à peu près, 1913 où il aura mis en scène plus de 500 films. Jacques Mény s'attarde notamment sur les trouvailles de Méliès, que ce soit la démultiplication des têtes, les disparitions d'objets et de personnages, les métamorphoses, les différents tableaux ou encore la colorisation de certaines pellicules. En plus d'être passionnant, c'est superbement mis en scène, souvent avec des exemples concrets, lisibles et pertinents, associé à une voix-off reprenant les mots de Méliès. Les trucages sont souvent géniaux et époustouflants, encore aujourd'hui, associés à l'imagination sans failles de ce pionnier qui débordent d'inventivités à l'image des détails précis de la conception de Le Mélomane ou Le Voyage dans la Lune.
Jacques Mény capte aussi l'homme qu'était Méliès, homme orchestre et véritable caméléon capable de tout faire, que ce soit mettre en scène, jouer, dessiner ou réaliser les trucages. L'homme aussi à la vie mais toujours dans le cadre du cinéma, où il évoque qu'il ne pense pas, ou peu, au scénario mais surtout à susciter l'émotion du spectateur, le surprendre et le faire rêver. Et enfin, à l'aide aussi de témoignages extérieurs et de nombreuses, et passionnantes images d'archives, le documentaire évoque les liens entre Méliès et ses producteurs, ceux à qui il vendait ses films, souvent des forains ou encore le plagiat qu'il a subi, surtout de la part des Etats-Unis. Une partie importante car elle aborde aussi la partie "commerce" du cinéma qui était déjà capable de s'interposer à l'art, ce qui trouve une résonance particulière encore aujourd'hui. Mény trouve toujours le bon équilibre entre la vie privée de Méliès mais surtout sa vision du cinéma et ses méthodes, avec un certain dynamisme, une clarté totale et une narration parfaite, où la voix-off se montre toujours juste et pertinente tandis que les images d'archives sont de vrais bijoux qui donnent encore plus envie de redécouvrir l'oeuvre de ce génie qui marqua à jamais le 7ème art.
Un documentaire important et qui arrive à donner une vision de Méliès, que ce soit l'homme ou son art, juste, pertinente et surtout passionnante, s'intéressant surtout, voire exclusivement, à son apport au cinéma, son génie, ses trouvailles ou encore sa vision. Un bijou.
Mes Méliès : http://www.senscritique.com/liste/Un_voyage_avec_George_Melies/429879