La Maison des égarées s'inscrit dans le projet 2011+10 visant à commémorer la catastrophe du séisme et du tsunami de Tohoku. Le film est pétri de louables intentions dans son traitement du trauma des survivants et d'une résilience qui passe par la reconstruction d'un noyau familial (une grand-mère recueille une orpheline et une fugueuse dans son étrange maison du bout de la colline). Mais l'exécution pêche par un manque de rythme souvent assommant, comme si refaire Totoro dans des décombres pouvait s'avérer suffisant.
Je cite Totoro car La Maison des égarées met en scène des yokai, de survenue un peu tardive dans l'intrigue et d'intérêt scénaristique finalement limité, sauf à les voir comme un liant social traditionnel et un symbole du nécessaire retour à la Nature (avec tout ce que cela comporte de fantasmes passéistes voire réactionnaires). Surtout que ces créatures perdent au passage l'ambiguïté de leur rapport aux humains, devenant ici des protecteurs dévoués à notre cause dans la lutte contre un serpent oni incarnant la souffrance post-traumatique et la tentation de l'abandon (séquences où le film se réveille enfin).
La direction artistique est jolie, avec des décors photoréalistes de paysages campagnards et de ruines d'immeuble (qui apparaissent bien documentés) mais au final assez impersonnelle et contrastant avec le design plus sobre et passe-partout des personnages et des yokai. Il existe des interludes de conte au graphisme beaucoup plus original, presque expérimental tant certains sont confus, que l'on doit à l'animateur Bahi JD. Je trouve que la catastrophe demeure trop en arrière-plan pour parvenir à en dire quelque chose, sans doute par excès de pudeur et par volonté de destiner le film à un jeune public.
La Maison des égarées a donc plein de bonnes idées sur le papier mais le résultat est un peu décevant, à moins de se laisser happer par son ambiance de chill "Yokai Crossing" (bon résumé piqué au présentateur du film) dans laquelle flotte du trauma non-dit.
PS : l'affiche française est vraiment pas ouf.