Enfermées dans la cave. C'est ce qui arrive aux méchantes filles telles que Henrietta Baker qui ont trucidé le chat de la famille. A peine a-t-il remonté l'escalier et fait part à sa femme de ses inquiétudes concernant leur fille que M. Baker est lui-même trucidé. Sa femme n'a pas survécu bien longtemps après lui. Ces meurtres tendent à prouver qu'Henrietta n'était peut-être pas l'assassin du chat, à moins qu'elle soit parvenue à ouvrir une porte fermée à clef et que la peau de son bras (seul élément que l'on peut voir du tueur) se soit décomposée en cinq minutes.
Vingt ans plus tard, un couple de cibistes se rend dans la "maison du cauchemar" désormais abandonnée, d'où ils ont capté un étrange appel à l'aide suivi d'une musique inquiétante. Ils y trouvent quatre squateurs, eux aussi cibistes, qui démentent avoir émis ce message. Bien entendu, tous ces jeunes gens ne savent pas ce qu'il s'est passé ici... Si ils l'avaient su, ils en auraient vite conclus que le gardien fou n'est pas tout seul à leur mener la vie dure, et que les fantômes (principalement celui d'Henrietta) ont également leur mot à dire.

Vingt ans dans une maison déserte, forcément, ça vous ennuie son fantôme. Dès lors, il ne faut pas les blâmer de s'être abaissés à racoler les mortels via la cibi, procédé évoquant davantage les routiers solitaires et les jeunes désemparés que les exclus de l'au-delà. Après tout, c'est autrement plus pratique qu'un ouija, et si l'on en abuse pas il n'y a pas trop de risques de paraître ridicules. Pourtant jamais très regardant sur la vraisemblance, surtout à cette époque où lui-même et la plupart des autres survivants de l'âge d'or du cinéma bis talien faisaient n'importe quoi, Umberto Lenzi ne tombe pas dans ce-piège là, se contentant d'associer la cibi et les fantômes à une seule occasion, celle du message à l'origine de tout.

Par la suite, ce mode de communication sera cantonné à sa fonction première, c'est à dire permettre aux humains de dialoguer à distance, par exemple pour appeler à l'aide. Quant aux fantômes, ils seront revenus à des choses plus coutumières, voire convenues, et pas seulement dans le cadre des films de maisons hantées. Les portes qui claquent, les objets qui disparaissent et réapparaissent ou bien qui volent comme dans Poltergeist, les miroirs facétieux, tout cela est complété par quelques prophéties macabres en début de film (dont l'incontournable vieux fou qui cherche à faire peur) et surtout par la présence d'une fillette fantôme et de sa poupée clown. Deux ingrédients usés jusqu'à la corde : on ne compte plus les gamins sinistres du cinéma d'horreur, représentant la perversion de l'innocence parfois traduite par leur association à une musique sous forme de comptine. C'est aussi le cas ici, avec cet air mélodieux doublé de sons obsédants annonçant la gamine en robe blanche que Lenzi cherche à rendre surréaliste via une surexposition aux projecteurs. Quant aux clowns, qu'ils soient des humains ou des poupées, leur présence est souvent utilisée dans le même but que les enfants. Au risque de faire doublon, Lenzi emploie donc les deux, mais avec une audace typiquement lenzienne : la poupée sert également de personnage, elle est plus active en tout cas que la jeune Henrietta, qui reste souvent prostrée en regardant méchamment les jeunes cibistes appelés à mourir. Le clown se permet ainsi de changer de visage à l'occasion, affichant de vilaines dents pointues lorsqu'il s'apprête à sauter au visage du malheureux choisi pour victime (car le clown bénéficie lui aussi du don d'apparaître et de disparaître à volonté).

Mais la plus grande innovation du père Lenzi est encore d'avoir envoyé un tueur de chair et de sang aux abords de la maison en même temps que les fantômes. Il s'agit tout simplement du gardien fou, celui-là même qui avait accueilli si rudement nos cibistes lors de leur arrivée à la maison. Ses troubles mentaux notoirement connus et sa tendance à courir après ces dames une paire de cisailles à la main seront bien pratiques pour le policier chargé de l'enquête, pas vraiment emballé à l'idée d'inculper le fantôme d'une gamine morte d'inanition il y a vingt ans. Il n'empêche que le tueur n'a tué personne, et que sous son air quelque peu nigaud, tout en raideur et en grimaces (autrefois honorable second couteau pour westerns spaghettis, son interprète Donald O'Brien a été victime de l'écroulement du cinéma transalpin), ce gardien est au cœur des événements permettant d'expliquer la présence de fantômes dans l'ex demeure des Baker (et dans leur dernière demeure aussi, puisque la crypte familiale est tout aussi hantée, comme quoi après vingt ans les fantômes rêvaient se dégourdir les jambes).

Explications pour le moins farfelues, rappelant qu'Umberto Lenzi a aussi été réalisateur de gialli. Même si elle en appelle probablement plus aux amateurs de slashers américains (effet de mode oblige), sa mise en scène se rapproche parfois de ce genre en vogue une dizaine d'années plus tôt, notamment lorsque la caméra sert à présenter le point de vue du tueur ou de l'entité. C'est le cas lorsque l'on aperçoit un bras qui arrive subitement dans le cadre, et qui n'annonce rien de bon pour la personne en vue... à moins que la vision subjective soit celle d'un ami malicieux et que cela provoque l'effet éculé du "ouf" de soulagement. Mais si ce n'est pour les Baker en début de film, le réalisateur préfère quand même avoir recours au fantastique pour ses morts qu'il envisage un chouïa plus originales que de simples coups d'armes blanches. Un ventilateur qui envoie une pale dans la gorge d'un homme, une guillotine qui coupe une femme en deux, voilà des meurtres un peu plus croustillants en ces fin d'années 80 où le démonstratif passe mieux que les meurtres hitchcockiens.

Pourtant, le gore n'est pas vraiment de mise, ou plus exactement il est assez furtif. Ce qui est probablement plus dû à des effets spéciaux pas forcément au top qu'à la volonté de ne pas paraître trop rentre-dedans au sein d'un genre, la maison hantée, qui s'en est toujours mieux sorti dans le domaine suggestif. La Maison du cauchemar aussi, puisque le rares scènes jouant sur ce créneau sont les plus réussies (la copie de Poltergeist avec les objets qui volent, l'apparition impromptue de la mort en personne, quelques allées et venues dans les couloirs -très belle bâtisse que celle utilisée, au passage-). Hélas Lenzi se disperse et rompt le charme de ces moments, non seulement par les raisons déjà évoquées, mais aussi par des personnages de cibistes pour le moins légers, voire ternes. Plus ces personnages font figure de héros, moins ils disposent de traits de caractère, que ce soit concernant l'humour ou la psychologie. Par conséquent, les plus notables sont tout en bas de l'échelle, au rayon des pitres de service. L'un d'entre eux est un auto-stoppeur ramassé au début, lâché cinq minutes plus tard et qui reviendra se faire tuer en squattant la maison du cauchemar. Entre temps, il aura procédé deux fois à un gag de bon aloi, celui du faux bras en forme de squelette, qui ne fait rire que lui (on en viendrait presque à le prendre en pitié, tant sa tentative de faire ami-ami est maladroite). L'autre est une jeune mythomane hystérique qui a force d'avoir trop crié au loup n'est plus prise au sérieux par personne... même pas après la mort de son frère, évènement dont tout le monde se moque éperdument.

Dans l'horreur italienne des années 80, on peut trouver bien pire que cette Maison du cauchemar. Et si l'on ne considère que la seconde moitié de cette décennie, on pourra même dire qu'il est difficile de trouver mieux, à moins de privilégier les séries Z et leur humour involontaire... Lenzi a réalisé un film globalement bâclé, en lequel il n'insuffle même pas ce petit quelque chose (de l'aveuglement artistique ?) qui rendait amusants certains de ses films parmi les plus ratés. Il a tout simplement fait ce que l'on attendait de lui, c'est à dire un film d'horreur bouffant à tous les râteliers (du gore à l'épouvante en passant par le slasher / giallo) avec quelques points positifs délivrés au compte-gouttes, et à distribuer sous le titre de La Casa 3 (donc Evil Dead 3 en Italie).
iGore
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le 19 oct. 2011

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