http://www.flaneriescinematographiques.com/article-la-marseillaise-88084651.html

La Marseillaise est un Renoir atypique, dont l'accent provençal et le caractère parfois un peu (trop) folklorique évoquent par instants le cinéma de Pagnol. On retrouve d'ailleurs à son générique plusieurs habitués des films du cinéaste d'Aubagne, tel Edouard Delmont, qui tourna sous sa direction Jofroi (1933), Angèle (1934), César (1936), Regain (1397) ou encore La femme du boulanger (1938). On citera aussi Andrex, présent également dans Angèle. A noter que ces deux comédiens partagèrent en 1935 l'affiche de Toni, de Renoir.

Œuvre de commande destinée à célébrer le 150ème anniversaire de la Révolution, La Marseillaise est fortement marquée par le contexte politique de l'époque (le tournage eut lieu en plein Front populaire) et sa principale source de financement (ce film fut en partie produit par la CGT grâce à un système de participation où les spectateurs préachetaient leur place). En sorte que son auteur nous livre une vision un brin caricaturale (ou à tout le moins digne de l'imagerie d'Epinal) des évènements révolutionnaires et des personnages qui les ont traversés. Ainsi, si le portrait de Louis XVI reste plutôt mesuré, celui de Marie-Antoinette apparaît très à charge. Tout comme ceux des aristocrates, qui, exception faite du marquis de Saint-Laurent (incarné par Aimé Clarion), sont tous dépeints au mieux comme des êtres futiles (voir la scène située dans l'hôtel de Coblence), au pire comme d'aveugles réactionnaires. En fait, les moments les plus justes et les plus émouvants du film sont ceux où Renoir se fait moins ouvertement le chantre d'une idéologie et renonce à son ambition de réaliser une fresque historique (on peut tout de même saluer la parfaite maîtrise de sa mise en scène). Situant alors son récit à une échelle plus intime, il retrouve le bel humanisme qui imprègne l'ensemble de son œuvre.

Plus impersonnel que les autres réalisations de l'auteur, La Marseillaise n'est donc pas un Renoir majeur. On retiendra cependant le soin accordé aux reconstitutions et les prestations de grands acteurs, comme Pierre Renoir ou Louis Jouvet. On relèvera également le très beau travail des différents opérateurs ayant officié sur le film : Jean-Paul Alphen, qui assista Jacques Lemare sur La règle du jeu ; Jean Bourgoin, assistant caméraman sur La grande illusion, mais également directeur de la photographie de Welles (Mr Arkadin) ou Tati (Mon oncle) et oscarisé en 1963 pour Le jour le plus long (récompense partagée avec Walter Wottitz) ; Alain Douarinou, l'un des cadreurs attitrés de Max Ophüls (La ronde, Le plaisir, Madame de..., Lola Montès) ; Jean-Marie Maillols, notamment assistant caméraman sur Le procès de Jeanne d'Arc de Bresson.
ChristopheL1
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le 13 nov. 2011

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