La mère de Poudovkine est, à bien des égards, à la fois un film dans la continuité de Eisenstein mais également son penchant opposé.
En effet Poudovkine voulait se détacher de Eisenstein en mettant au centre de ses films, ou en tout cas ici, un personnage principal fixe, la ou Eisenstein, dans la Grève par exemple, met au centre de son film les masses, la foule, le peuple d'un côté et une autre masse dirigeante et menaçante de l'autre.
Et, malgré une histoire tout bonnement similaire, la différence majeure donc entre la Grève de Eisenstein et ici "La mère" de Poudovkine c'est ce clivage entre d'un côté la foule et de l'autre l'individu qui vit par avec cette foule. Ici le personnage principal c'est la mère et un peu son fils, et on vit autour de ce(s) personnage(s) qui évolue dans le sens de la foule mais en étant mit en avant.
Le titre lui même montre la différence avec Eisenstein, La Grève met bien en avant une action collective, le cuirassé Potemkine un lieu ou évoluent plusieurs personnages etc... la ou Poudovkine nomme son film "la mère" personnage principale de son œuvre, idée absente chez Eisenstein.
Le film est donc inspiré d'une œuvre de Maxime Gorki est met en scène l'histoire d'une révolution raté ayant eu lieu en 1905, partant d'une simple grève/mutinerie dans une entreprise et allant jusqu’à un mouvement de foule révolutionnaire autour d'une prison à la fin du film.
Film de propagande bien entendu, le message étant qu'en 1905 la révolution était inévitable, l'état ayant tout les pouvoirs, la justice étant corrompu etc... et le film montre plutôt bien tout ces aspects.
Au delà du message et d'une reprise plutôt rigolote de la Marseillaise en fin de film, "La mère" est très intéressant pour sa mise en scène, son montage (très réussi) et la mise en avant du personnage de la mère et de son fils, en effet Poudovkine voulait absolument que les acteurs et leur talent soient au centre de ses films, il voulait faire vivre ses comédiens et pour cela il fallait éviter de tomber dans une idée trop forte de foule comme Eisenstein et mettre en avant un personnage fixe, comme je l'ai dis plus haut. Ainsi le personnage de la mère est bluffant de justesse, tout autant que son fils et le film vit grâce à eux.
En plus le film est doté d'une photographie de qualité et fait parfois penser à "A travers l'orage" de Griffith, que ce soit par le personnage de la mère tout autant que par certaines scènes et certains plans, surtout ceux mettant en avant la glace et le passage du fils sur celle ci.
Un film muet d'une grande qualité donc, au message bien sur très porté sur la propagande communiste, mais qui permet une approche un peu différente de par le travail de Poudovkine sur l'écriture de ses personnages!
Ps : on peut aussi indiquer que le film est par moment plutôt touchant.