La force des personnalités (je parle de "vraies" personnalités, pas des surfaites construites à partir d'une sur-production médiatique) est d'avoir ce pouvoir improbable de traverser le temps et l'espace, pour nous éblouir de leur talent, certes désuet, à travers leur voix, leur vision du monde, leur prestance... Edith Piaf est de celle-là, une voix d'une puissance inouïe avec un accent improbable et reconnaissable entre tous.
Dahan raconte l'histoire en tentant de nous émouvoir de la façon la plus maladroite possible, en tordant le visage et le corps de la pauvre Marion Cotillard. Marion Cotillard qui grimace en permanence. Des fois ça passe, des fois ça ne passe pas, c'est tellement mal pensé que nous ne savons plus si il sourit ou si elle souffre. La faute à une gestion de la mise en scène uniformisée, pour bien appuyer sur les malheurs de la petite Sophie, euh, je voulais dire de la pauvre Edith Piaf, mais sans à avoir à les développer réellement, puisque le film enchaîne les "sauts dans le temps".
La narration décousue offre donc un panorama de la vie d'Edith sans prendre de réel point de vue, donc ne prend aucun risque, en tentant le patho maladroit et complètement vain.
Alors bizarrement, une forme de charme opère. Mais ce n'est ni grâce au jeu des acteurs (très franchouillard pour certains) ni à la mise en scène (ces déplacements de caméra dans le style des shows télévisés qui enlèvent tout sens aux travellings, travellings devenus des sortes d'effets de manche qui font hype, bel exemple d'uniformisation du cinéma), mais grâce à sa BO formidable et cette voix, bordel, cette voix surgie des profondeurs d'un petit bout de femme malmené par la vie.
Il y a, malgré tout, des idées, c'est vrai. Notamment ce concert où nous la voyons chanter sans l'entendre, couvert par une musique qui monte progressivement. Bon, cette même musique gâche le tout en grondant et nous envahissant les oreilles sur la fin, mais il y a de l'idée.
Ce film est probablement un des films les plus racoleurs que je n'ai jamais vu, parce qu'il ne s'appuie que sur les chants de la Dame pour nous vendre des images méprisables.