On remplace Doug Liman, qui avait très bien fait le boulot avec La Mémoire dans la Peau, par Paul Greengrass, qui vient avec son style à la fois réaliste et sous tension, pour nous faire vivre le retour aux affaires d'un Jason Bourne en colère et ne reculant devant rien.
Et c'est ça qui marque, l'évolution entre les deux premiers opus, la façon dont le metteur en scène britannique apporte une incroyable et forte tension, ainsi qu'une nervosité que l'on ressent sur chaque centimètre de pellicule. Il parvient à mettre en scène un Bourne blessé mais implacable, sachant reprendre les vieilles habitudes hérités des années Treadstone, avec une once d'humanité, alors qu'il met parfaitement en place un passionnant puzzle scénaristique nous permettant de peu à peu comprendre ce qu'il s'est passé.
Greengrass fait dans le réaliste et surtout l'immersion, on ne regarde pas les événements, on les vit, et on se retrouve au plus près de séquences spectaculaires et d'authentiques combats, parfaitement chorégraphiés et dosés. Quelques scènes sont des modèles du genre, à l'image du sniper sur le toit ou de la dernière partie, alors qu'il parvient à créer une ambiance tour à tour mystérieuse et intense, mais surtout prenante, sublimant son cadre ainsi que les villes qu'il met en scène.
Alors que l'on est littéralement plongé au cœur de l'action, on ne peut qu'apprécier de voir un Bourne approfondi, cherchant à comprendre la CIA tout en explorant son passé, le tout dans un univers où la violence est partout et une liberté individuelle contrôlée. Pour cela, on ne peut que saluer le parfait choix de Matt Damon qui, loin de n'avoir qu'une simple tête de bovin, parvient à donner à son regard une forme d'inquiétude, une nuance dans la froideur que devrait avoir un agent ayant subit sa formation, effaçant son sourire et annonçant une violente traque de ceux qui lui font subir, encore aujourd’hui, un dur traitement. On croit en lui, que ce soit lorsqu'il commet des actes sauvages ou lorsqu'il regrette des faits passés, comme en témoigne cette remarquable séquence en Russie où il est confronté à la fille d'un couple qu'il aurait tué.
Greengrass n'en oublie pas ceux tournant autour de lui, à l'image d'un très bon Brian Cox voyant l'étau se refermer autour de lui ou un Karl Urban assez froid en dangereux tueur, ils sont soignés et n'ont pas besoin de beaucoup de dialogues ou apparitions pour exister. Le britannique démontre une parfaite maîtrise du montage et de la construction du récit, il fait cela intelligemment, et trouve la parfaite alchimie entre une énorme tension, l'avancement de l'histoire et mise en avant du fonctionnement d'agence comme la CIA. On notera aussi une bande-originale adéquate aux images, notamment lors des séquences d'actions, et la façon remarquable dont elle est utilisée, sachant s'effacer dans les moments adéquats.
Paul Greengrass prend, avec grand talent, les rênes de la saga Jason Bourne et propose avec La Mort dans la Peau une oeuvre implacable, intelligente et constamment sous tension, avec des séquences mémorables, une intrigue et des personnages passionnants ou encore un parfait Matt Damon, véhiculant par un simple regard une inquiétude et une immense force.