Curieux film, entre l'histoire et la fiction, qui imagine Restif de la Bretonne et Casanova se retrouver dans une dilligence avec sr Thomas Payne à la poursuite de la dilligence de Louis XVI lors de l'épisode de la fuite à Varennes. Contrairement à son titre, le film se passe en grande partie de jour, l'essentiel des séquences étant composé de discussions inquiète des personnages, dans la dilligence ou dans les relais où ils s'arrêtent.
La reconstitution historique est assez dépouillée, mais le casting international est impressionnant, avec un Restif de la Bretonne en véritable papy pervers, un caméo de Keitel en Thomas Payne, qui donne aussitôt envie de revoir Les duellistes ! Et surtout Hanna Shygullah en comtesse en mission pour la reine, et Mastroianni jouant un Casanova vieillissant et dépassé par les événements. Aussi Gélin en banquier, Brialy en laquais efféminé, Trintignant en pleutre, Piccoli en Louis XVI dont on ne voit que les bas. Un véritable festival. Par contre la postsynchronisation des paroles laisse à désirer, comme souvent dans ce genre de production européenne.
La réalisation réserve de beaux plans, souvent fixes, sur les paysages (la Champagne pouilleuse) ou les décors (l'auberge finale), l'accent étant mis sur les expressions de visages. Rien de révolutionnaire, mais c'est plutôt dans le rythme, alignant les mini-épisodes, les conversations laissées inachevées, puis reprises, que se situe l'originalité. Je pensais notamment, à tort ou à raison, à Jacques le fataliste de Diderot. La juxtaposition de personnages historiques à la réunion improbable est assez réjouissante, pour peu qu'on ait quelques éléments de contexte.
Il y a des excursus didactiques étonnants, comme ce plan expliquant, comme une note de bas-de-page, ce qu'était une "désobligeante" (un carosse à une place), ou Casanova expliquant pourquoi il était peu connu en 1792.
On trouve aussi une hilarante scène de poursuite en dilligence, où Mastroianni fait mettre la ceinture à son camarade, et où les poursuivis disent "Mais qu'est-ce qu'ils font ? Ils n'ont pas le droit de nous dépasser !". Digne d'un Goscinny.
La nuit de Varennes est une sorte de nouvelle, qui prend plus de plaisir dans une narration picaresque que dans un véritable essai politique, le discours sur la Révolution se faisant polyphonique, à travers les différents personnages, et se terminant étrangement sur une forme d'empathie pour la comtesse proche de la reine et son sentiment de voir son monde s'écrouler. Les scènes avec le camelot montrant le diorama, au début et à la fin, est bien sûr une parabole sur le cinéma qui encourage le spectateur à mettre à distance et à réfléchir par soi-même.
Synopsis : Un camelot montrant un diorama de la Révolution sous le pont de Notre-Dame. Une errance nocturne de Restif de la Bretonne. Dans un bordel, il apprend la nouvelle d'une calèche sortie du palais royal. Il va enquêter et voit une confidente de la reine partir. Il emprunte un cheval, se fait aider de Casanova pour rattraper la dilligence. Ils devisent sur la gaudriole avec ces dames. Casanova chante avec une grosse cantatrice.
La nouvelle de la fuite du roi se répand. Payne discute le droit divin. Casanova déplore avec la Révolution la fin de l'âge de la dignité et part de son côté. Le groupe arrive enfin à Varrennes. La comtesse perd pied : on comprend qu'elle avait pour mission de porter le costume que le roi devait porter le lendemain devant ses troupes au camp de Montmédy. D'un air halluciné, elle se prosterne devant le mannequin portant le costume.