Georges Romero passe à la réalisation en 1968 avec La Nuit des Morts-vivants, premier sérieux mètre-étalon du film de zombie. Il en fait sa spécialité et devient le pape du cinéma gore et du bis. Dix ans plus tard, il exécute un autre coup-d'éclat en sortant Dawn of the Dead aka Zombie, critique cinglante et explicite de la société de consommation. Entre 1985 et 2005, Romero passe à d'autres sujets. Il obtient peu de succès (La part des ténèbres, Bruiser) et tend à s'effacer, jusqu'à son retour des années 2005-2009 avec une nouvelle trilogie mettant en scène les morts-vivants, plutôt acclamée par la critique officielle mais sujette à de nombreuses polémiques chez les cinéphiles.


Au début de cette prise de distance et alors que Romero n'est pas encore sur la pente descendante, il décide d'offrir à son classique de 1968 une nouvelle jeunesse. L'illustre maquilleur Tom Savini, collaborateur régulier de Romero depuis Martin en 1977, est chargé de l'exécution de la version 1990 de La Nuit des Morts Vivants. Comme pour la plupart des remake réalisés par la suite (l'ensemble des classiques des 1970s seront passés en revue par de grands studios dans les années 2000), l'intérêt est surtout pécunier. Romero et ses associés comptent réparer l'erreur commise en 1968 lorsque TNLD fut inscrit dans le domaine public, ne leur rapportant donc aucun bénéfice.


Cette nouvelle mouture plonge directement dans le bain. Une séquence très second degré débouche sur l'horreur et l'assaut des zombies est bien lancé. Le film devient vite grave et même très lourd, tout en jouissant de la liberté et de la mobilité que seul un produit 'bis' ou 'de genre' peut s'autoriser si gratuitement. Le sentiment d'urgence est maintenu, l'atmosphère est paroxystique dans le domaine, les personnages se débattent et se confrontent sans arrêt. Les portraits sont assez bons (surtout pour les deux fortes têtes et la nouvelle Barbara), bien qu'un plafond dans leur développement soit atteint (les secondaires s'avèreront stériles). Cette difficulté à transformer l'essai est bien plus évidente en ce qui concerne le discours.


À mesure que la fin approche, Romero (producteur et co-scénariste) et Savini essaient de développer un propos sur la part monstrueuse de l'Humanité, sans trop savoir s'y prendre. L'aspiration est claire mais rien de consistant ne vient la nourrir. De façon générale, l'efficacité du film est nuancée par cette difficulté à affirmer des ambitions supérieures. La Nuit des Morts vivants montre un chemin, fournit un plan riche pour l'avenir du zombie-movie ; mais reste bloqué à l'étage de la démonstration primaire – quoiqu'irréprochable par ailleurs. Le panache et les astuces ne manquent et la séance est plaisante. Les auteurs osent épuiser leurs ressources : des personnages clés prennent des risques, meurent, les plans sont contrariés.


Pas de changement d'espace et peu de recours ; c'est presque un huis-clos, sans ailleurs accessible, sans miracle et même quasiment insoluble. Avec peu de génie mais beaucoup d'inspiration et de générosité, Savini réussit à rendre l'affaire intense. Il n'en reste malheureusement pas grand chose (ce n'est pas Stuart Gordon), d'autant que le contenu politique de l'original a été évacué ; néanmoins celui-là était loin d'être palpitant et sous l'audace de principe il n'y avait pas de réflexion fulgurante. Night of the Living Dead '2' est donc une réussite modérée, avec des décors excellents, où le Savini réalisateur n'est pas encore au niveau du Savini générateur d'effets spéciaux. Malgré son côté étriqué il apparaît comme un ancêtre bien en phase avec la nouvelle vague de zombies du tournant 2010, ère Walking Dead.


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le 21 juil. 2015

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