une réussite mélange de Hitchcok et de Burton
Parkersburg, en Virginie, au bord de l'Ohio, dans les années 30. Avant d'être arrêté par la police, Ben Harper a le temps de remettre le produit d'un hold-up, dix mille dollars, à ses deux enfants, le jeune John et la toute petite Pearl. Il leur fait jurer de ne dire à personne, pas même à leur mère, où le trésor se trouve, afin qu'ils l'aient encore à leur majorité. Ben est condamné à mort pour un double meurtre.
En prison, il rencontre le pasteur Harry Powell. C'est un homme étrange, à demi fou, meurtrier d'une douzaine de veuves, vêtu entièrement de noir, dont les doigts de la main droite portent les lettres du mot LOVE et ceux de la main gauche le mot HATE. Ben parle dans son sommeil, et, interrogé par Powell, laisse entendre qu'il a un magot.
Une fois libéré, Powell se rend à la ferme des Harper. Il séduit leur mère, Willa, et l'épouse. Il interroge les deux enfants mais n'obtient rien. Quand il comprend que Willa ne sait rien mais qu'elle commence à se douter de quelque chose et suspecte ses intentions, il la tue et laisse courir le bruit qu'elle est partie. En fait son cadavre, placé dans sa voiture, repose au fond de la rivière, les cheveux flottant au gré du courant.
Les gosses réussissent à enfermer Powell dans la cave. Il venait de faire avouer à la fillette que le magot se trouve dans sa poupée. John et Pearl descendent le fleuve en barque et sont recueillis par la vieille Rachel, une femme généreuse et maternelle qui s'occupe déjà de deux enfants. Powell vient réclamer John et Pearl comme s'ils étaient à lui, mais Rachel le chasse avec son fusil. Plus tard il revient et elle tire sur lui avant d'appeler la police qui l'arrête. John assiste à cette arrestation, la confond avec celle de son père et, bouleversé, rend les dollars à Powell comme s'il était son père. Après son procès, la foule veut lyncher Powell. Les policiers sont obligés de le transférer dans une autre prison. Rachel élèvera les enfants.
Chef-d'œuvre presque unanimement apprécié des cinéphiles, La nuit du chasseur fut un échec commercial et empêcha Laughton de continuer une carrière de metteur en scène. Empruntant au film noir, il s'inscrit aussi dans la lignée des contes noirs, des récits d'aventures plus ou moins fantastiques et cauchemardesques dont les enfants sont à la fois les héros et les victimes .
Un univers expressionniste pour une morale libératrice
L'expressionnisme est manifeste dans les décors de studio et les jeux d'éclairages violants où l'ombre et la lumière s'affrontent comme des forces surnaturelles qui emprisonnent les personnages. Ceux-ci sont agis par ces forces qui les dépassent. D'où le jeu très marqué de Mitchum qui parait parfois agité de pulsion incontrôlable (le couteau) mais qui fait aussi preuve d'un humour irrésistible (avec les Spoon) ou de cabotinage de haut vol (l'affrontement de main droite et main gauche où LOVE finit par triompher de HATE) .
Tout noir et expressionniste qu'il soit sur le plan plastique, le film est loin de se complaire dans une esthétique datée ou un propos pessimiste. Une part importante de son message vise à montrer que l'endurance naturelle des enfants et leur innocence peuvent venir à bout de la folie, de la cupidité et du mal qui sont le lot des adultes.
La symbolique des pères remise en question
Si les enfants doivent traverser la nuit presque seuls, c'est du au contexte de la crise des années 30. Le père vole et tue pour que ses enfants échappent à la misère. ilse rapproche de la figure du bourreau, ancien mineur qui prend des hommes amis est aimé par sa femme et protège ses enfants.
Les enfants trouvent naturellement leur voie dans ce monde
Laugthon n'a sans doute pas voulu exprimer plus clairement son idée cosmique. C'est l'innocence et l'humilité qui sont mis en avant