Chiiiildreeen... (Mission Hunky-Dory n°1)
J'ai pas mal hésité entre 7 et 8 pour la note, preuve que je n'ai pas un point de vue tranché sur ce film.
La Nuit du Chasseur est bon, indéniablement. Et Robert Mitchum est impressionnant de justesse dans ce rôle de prêtre sadique et angoissant.
L'histoire s'enchaîne plutôt bien jusqu'au mariage d'Harry Powell avec la veuve Harper qui va détruire pour de bon l'équilibre bancal de la petite famille.
Même si j'ai généralement accroché avec tous les personnages, j'ai eu beaucoup de mal avec feu Madame Harper, que j'avais sérieusement envie d'emplafonner tellement elle exagérait son rôle de niaise influençable et sans la moindre reflexion.
Mais passons. Le jeu de course poursuite entre le prête et les enfants rattrape tout !
On voit le prêtre sur le point de les attraper ou de les tuer de nombreuses fois, et chaque fois ils s'en sortent in extremis, grâce souvent à l'ingéniosité du jeune garçon.
Harry Powell est angoissant et les plans où il apparaît soudainement dans l'ombre sont vraiment très efficaces.
Et en restant "à la surface" du film, on pourrait s'arrêter là, mais le réalisateur nous envoie des messages subtils tout au long de l'histoire, impossibles à ne pas prendre en compte.
Il y a toute cette réflexion sur la morale, cette limite entre le bien et le mal, car peut on dire qu'on fait le bien sous prétexte que l'on croit recevoir des messages de Dieu? Est ce que chaque homme n'a pas une part d'immoralité ? On le voit à travers Ben Harper qui fait jurer à son fils et à sa fille de ne jamais dire où se trouve l'argent. Sur le moment on ne perçoit pas vraiment les conséquences de cet acte sur le jeune garçon, mais quand Harry Powell (spoilers) est arrêté devant ses yeux tout comme son père, l'enfant est à bout de nerfs et crie à son père qu'il lui a posé un trop lourd fardeau sur les épaules.
Comme le souligne la vieille dame bienfaitrice à la fin du film, les enfants supportent beaucoup de choses, et traversent des épreuves (en apparence) plus facilement que bon nombre d'adultes, mais cela signifie-t-i pour autant qu'ils ne doivent pas être ménagés ?
Quand Harry Powell fait comprendre au jeune garçon que son avis ne compte pas " c'est ta parole contre la mienne", n'est ce pas un manque de morale du prêtre, mais aussi de la veuve Harper qui donnera spontanément raison à son mari ?
Ce que j'avais pu prendre pour une trop grande place de Dieu et de sa parole moralisatrice dans le film est en fait une invitation à la réflexion sur la limite de ce que l'on peut accomplir "au nom de la foi", sur l'existence sous-jacente des différentes "échelles de morale" en fonction de l'âge ou de la condition sociale des personnes concernées.
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