Dans le registre de la féerie et du rêve éveillé, je préfère le "Orphée" de Jean Cocteau, qui sortira en 1950, certes beaucoup plus brumeux, dans lequel Jean Marais, ne serait-ce que ça, me paraît beaucoup plus convaincant et investi que Fernand Gravey, ici un peu niais et fade dans le rôle d'un étudiant en philosophie — monsieur a 38 ans à l'époque, il faut faire un petit effort d'abstraction.


Il y a de quoi être surpris de la part de Marcel L'Herbier, pour qui le connaît à travers "L'Inhumaine" ou "Feu Mathias Pascal" (autrement dit une veine graphique aux antipodes). Du point de vue stylistique, on croirait qu'il s'agit d'un réalisateur différent, indépendamment de la différence d'époque — celui-ci ayant été réalisé sous l'occupation là où "L'Inhumaine" remonte au début des années 20. Mais tout de même, cette profusion de chic, de paillettes, de magie, et de superficialité a de quoi surprendre. Vraiment, on se croirait dans un croisement entre l'extase d'un Ophüls et le fantastique d'un Cocteau. Pour le reste, il ne faut pas avoir peur de l'abus d'effacement de frontière entre le rêve et la réalité, "La Nuit fantastique" jouant énormément sur cette incertitude, avec une aventure qui pourrait être bien réelle ou bien qui pourrait relever de la douce rêverie. Il y a très clairement des deux.


Sans doute qu'il faut trouver dans le surmenage du protagoniste les raisons de ces échappatoires nocturnes, un étudiant sans le sou, surmené, partagé entre son bachotage le jour et son travail aux Halles la nuit. Son attrait pour la sieste est bien connue de tout son entourage, mais personne ne sait que ses songes le mènent près d'une jeune femme mystérieuse, Micheline Presle, drapée dans ses robes blanches, source d'une obsession grandissante. L'ambiance onirique qui résulte de cette interminable poursuite, avec une bonne dose de surréalisme, à braver les dangers et sauver la princesse de multiples pièges tendus par son entourage malsain, peut être un peu lourd à digérer.

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le 27 juin 2020

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Morrinson

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