Que le cinéma français me régale ces derniers mois, un cinéma qui ose, qui parvient à trouver un second souffle, qui s’ouvre à d’autres régions, d’autres styles de vie, ici, encore une campagne un peu paumée, avec des jeunes qui le sont sûrement tout autant, parce que dans un patelin comme le leur, où tout a quasiment fermé, difficile de faire quelque chose de ses journées et encore plus, de savoir quoi faire de son futur. Une chose les anime pourtant, la moto, les courses de motocross, sport que je découvre plus pleinement ici, un milieu extrême, qui demande un investissement énorme, une prise de risque indéniable, un univers masculin, non dénué de ses clichés, d’une certaine masculinité toxique même et des attentes de certains parents que l’on découvre tout aussi toxiques d’ailleurs. Ce film, c’est un mélange d’un peu tout ça, de l’adolescence, une amitié fusionnelle extraordinaire, planche de salut face au deuil d’un père, une passion commune, seule ambition à brève échéance, mais c’est également des évènements plus difficiles, une violence latente, celle d’un père bien trop exigeant, qui vit la réussite de son fils par procuration, une violence qui passe aussi par les mots, l’homophobie, le sexisme, les rumeurs, le harcèlement, autant de phénomènes, symboles d’une génération. L’errance d’une jeunesse qui ne sait pas vraiment quoi faire, qui ne vit que de petites délinquances, qui brave les interdits, des soirées à boire, à fumer des joints, parce qu’il n’y a vraiment rien d’autre à faire, parce que pour faire mieux, pour viser plus haut, il faut sortir de leur campagne, les études, les loisirs, tout est trop loin et trop cher, inatteignable. Antoine Chevrollier nous offre un premier long-métrage extraordinaire, une véritable claque, il s’est inspiré de sa jeunesse, de sa région, pour nous livrer un résultat intimiste, réaliste, pour nous immerger au cœur d’un village, où tout le monde se connait, pour le meilleur et parfois pour le pire. Visuellement, c’est un petit bijou, rien d’extravagant bien sûr, mais une atmosphère lumineuse, pourtant, les sujets sont difficiles, percutants, parfois insupportables, mais l’espoir est là, au-delà des souffrances, il faut savoir voir le beau qui nous entoure, tout est une affaire de détails. En ce qui concerne le scénario, il est d’une intelligence rare, il ne choisit pas la facilité, ne dévoile pas toutes ses cartes dès le début, doucement, il va montrer ce qui fait sa différence, une différence qui va représenter le déclencheur, le déclencheur d’une vague de haine, pas pour l’ami de toujours, mais de tous les autres, même de ceux qui devraient être là, inconditionnellement. Oui mais voilà, ça, c’est seulement dans un monde idyllique, hors, notre société est loin de l’être, parce qu’il est toujours plus facile de moquer, d’insulter, de rejeter, que d’accepter la différence et lorsque leurs actes conduisent à l’inimaginable, il sera trop tard pour s’en mordre les doigts. Quant au casting, c’est une merveille, Sayyid El Alami y est éblouissant de talent, Amaury Foucher est tout aussi touchant et Artus y est étonnant dans ce rôle si différent.
En bref : Un film absolument percutant, dont on ne ressort clairement pas indemne, le récit d’une adolescence paumée, dans un village qui ne l’est pas moins, qui ne sait pas vraiment quoi faire de ses journées, une jeunesse faite d’une violence latente, qui explose à la moindre excuse, l’exemple d’une masculinité toxique qui peut conduire au pire, de la sévérité d’un père qui participera à cette tragédie, mais également de cette amitié hors du commun, fusionnelle, seul phare dans la nuit, qui représente la lumière si bouleversante de cette histoire, soutien infaillible, envers et contre tous !
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