Le cinéma américain a ceci de remarquable que, pour lui, les sujets tabous n'existent pas. C'est même lui qui a le mieux stigmatisé les tares de l'Oncle Sam à travers des films exemplaires.
C'est le scandale du Watergate avec "Les hommes du président".
C'est la honteuse Guerre du Vietnam avec de nombreux films sans aucune concession, "Apocalypse now" en tête évidemment.
C'est l'impitoyable génocide indien, longtemps occulté certes, mais pour être ensuite montré dans toute son horreur avec notamment "Soldat bleu"...
Difficile de faire mieux, plus fort, dans l'autodénonciation à titre d'exorcisme.
Aussi, alors qu'en fait, dans les années 80 et encore plus aujourd'hui, l'Europe est bien plus concernée que les Etats-Unis (cela dit, eux, ils ont les tueries liées aux armes en vente libre, brrrr !), rien d'étonnant à ce que ce soit un réalisateur américain qui signe ce film traitant de façon frontale du terrorisme international.
George Roy Hill a choisi l'exemple type. A savoir le "terrorisme palestinien", exercé au nom d'un peuple revendiquant un territoire que lui conteste militairement l'état d'Israël. Une situation qui, à la limite, peut justifier un certain sentimentalisme vis-à-vis de ces combattants sans pays mais pas sans Cause.
C'est le cas de Charlie (Diane Keaton), comédienne anglaise qui se dit ouvertement pro-palestinienne. lors d'un pseudo-tournage de film publicitaire, elle est manipulée par l'un des deux camps. Mais pas celui de son choix : alors qu'elle croit flirter avec un résistant palestinien, elle se retrouve en réalité "l'hôte" d'une antenne des services secrets israéliens. Son chef, le très persuasif Kurtz (Klaus Kinski), va habilement miser sur ses sentiments humanistes pour la convaincre de travailler pour lui. Sa mission : se faire passer pour la maîtresse du résistant en question - neutralisé entre temps - pour approcher son frère Khalil (Sami Frey), commanditaire de plusieurs attentats meurtriers.
Bon, déjà, Keaton + Kinski + Frey = générique toute en fanitude assez... déflagrante !
Aussi déboussolé qu'elle, on suit Charlie dans ses déplacements téléguidés (Grèce, Angleterre, Allemagne, Liban). Et surtout dans sa découverte de l'intérieur du terrorisme suicidaire et des services secrets aux pouvoirs occultes. "Femme entre chien et loup" : d'un côté, celui qu'elle surnomme Joseph et qui est son contact israélien ; de l'autre le mystérieux Khalil, dont elle doit faciliter l'élimination au mépris de ses convictions. Passant successivement dans les bras de chacun d'eux, elle réalise qu'ils ont à peu près les mêmes cicatrices sur le corps et la même blessure d'âme.
Ce symbole évident, c'est toute l'honnêteté du film de George Roy Hill, qui renvoie les adversaires dos à dos. Sur le terrain, hélas, quelques 40 ans plus tard, ils sont toujours face à face.
Démonstration efficace des terribles effets du terrorisme tout comme des ripostes qu'il implique, impeccablement interprété par un trio d'acteurs alors inédit, "La petite fille au tambour" est un film à voir. D'ailleurs, à l'époque, beaucoup de critiques avaient choisi de battre le rappel ! Je roule pour lui !