Et en plus, c'est vrai que c'est un doublon!

« The Brasher Doubloon » est une seconde adaptation* du roman de Raymond Chandler « The High window », qui relate une enquête du détective Philip Marlowe. Il a été tourné la même année que « La dame du Lac » où le rôle de Marlowe était tenu par Robert Montgomery. Ici c’est George Montgomery qui s’y colle. Je ne crois pas qu’il y ait un lien familial entre les deux acteurs.
George Montgomery est un grand beau gosse plus près d’un Erroll Flynn que d’un Bogart ; on peut considérer que ça affadit un peu le personnage (et donc le film) mais, les spectatrices apprécieront, ça rend peut-être un peu plus crédible sa relation avec la jeune héroïne jouée par Nancy Guild.
Fritz Kortner (qui joue le collectionneur Rudolph Vannier) est un comédien allemand ayant, comme John Brahm, immigré aux Etats-Unis à l’arrivée d’Hitler au pouvoir en Allemagne.
Le début du film montre Marlowe arrivant dans une vieille et luxueuse demeure. Il est accueilli par la secrétaire de la riche veuve quinquagénaire qui doit l’engager. La secrétaire est interprétée par Nancy Guild et le détective est donc aussitôt charmé (comme moi). Revenu de son émotion, il est présenté à la propriétaire qui lui apprend l’objet de la mission qu’elle aimerait lui confier : retrouver une rarissime pièce de monnaie (le fameux doublon) qui a disparu du coffre. Les premières minutes nous mettent rapidement dans l’atmosphère typique des romans de détectives et de ceux de Chandler en particulier. L’intrigue est évidemment assez compliquée mais elle reste facilement compréhensible. Pour le reste, truands brutaux et bas fonds sont au rendez-vous. Les caves enfumées et les trognes de certains seconds rôles m’ont fait penser à certains films situés dans le vieux Londres (Whitechapel). John Brahm avait réalisé, en 1944, une bonne adaptation de « Jack l'Eventreur » : The lodger. Il parvient ici à insuffler un petit peu de style « noir » par quelques plans assez graphiques et le rythme de l’action est suffisamment soutenu pour que le spectacle soit bien agréable à suivre. Toutefois, ça reste un peu Sherlock Holmes à L.A.
En conclusion « The Brasher Doubloon » a été bien plaisant à découvrir. Après « Somewhere in the night » (également film d’énigme, mais moins simple, plus « noir » dans son graphisme et dont tous les aspects sont supérieurs), il laisse toutefois une impression de regrets puisque il est le dernier film de ce genre à nous permettre d’admirer Nancy Guild. La carrière de cette actrice qui m’a fait tant d’effet a effectivement été incompréhensiblement éphémère. Wikipedia m’a appris qu’elle est décédé en 1999.
Le film, qui est une série B (70 mn) n’est, semble-t-il, jamais sorti en salles en France. Il faudra attendre 22 ans pour que Philip Marlowe réapparaisse sur le grand écran et ce sera sous les traits de James Garner dans « La valse des truands » de Paul Bogart ( ! ça ne s’invente pas)

*Il existe une première adaptation de ce roman « The high window » réalisée en 1942 intitulée « Time to Kill ». C’est un film de Herbert I. Leeds. Le nom du détective avait été changé de Philip Marlowe en Michael Shayne. C’est l’excellent Lloyd Nolan (le policier de « Somewhere in the night » qui jouait le rôle du détective et qui fut donc, en fait, le vrai premier Marlowe. Encore un film qu’il va falloir trouver.