Difficile de croire à l'époque qu'un petit film de science-fiction dont personne ne voulait et mettant en scène des singes anthropomorphiques allait contribuer, un peu avant le "2001" de Kubrick, à révolutionner le genre, allait donner naissance à une des sagas les plus populaires du septième art et poserai malgré lui les bases du marchandising, bien avant "Les dents de la mer" et "Star Wars" (comme quoi Spielberg et Lucas n'ont pas tous les torts).

Librement adapté du roman éponyme de Pierre Boule, "La planète des singes" doit impérativement être replacé dans le contexte de l'époque, celle de la lutte pour les droits civiques, celle de l'assassinat de Kennedy et de Martin Luther King, celle du flower power, de l'émancipation de la femme et surtout, celle du conflit au Vietnam. Une période sacrément troublée qui allait, ironie du sort, redonner un coup de fouet à un cinéma se reposant un peu trop sur ses acquis.

Prenant son temps afin de créer une atmosphère mystérieuse (on ne voit les singes du titre qu'à partir de la trentième minute) et expérimental à plus d'un titre (notamment dans l'utilisation de la superbe partition de Jerry Goldsmith), le film de Schaffner est l'archétype du film contestataire de l'époque, brassant une multitudes de sujets, sorte de mirroir déformant absolument cauchemardesque où l'homme voit ses certitudes voler en éclats, son fantasme par rapport à l'animal devenant une triste réalité. Mais s'il a dôté le singe de son intelligence, de sa curiosité scientifique, l'homme lui a également légué son arrogance, son obscurantisme, son besoin de tout contrôler.

Critique virulente d'une humanité qui causera sa propre destruction (voir le final mythique et tétanisant), "La planète des singes" est un classique incontestable qui n'a pas prit une ride grâce à une approche formelle et thématique pertinente, ainsi qu'aux maquillages inoubliables de John Chambers, porté par le charisme de Charlton Heston, caricature du héros américain sûr de lui, cynique et négatif, qui devra pourtant faire appel à toutes ses facultés et à son intelligence afin de ne pas sombrer dans la folie.
Gand-Alf
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Repliques cultes., Gand-Alf and Emma Peel's Excellent Bluraythèque., Un film, une scène., Vus au cinéma. et Ca ferait un beau parking !

Créée

le 7 févr. 2013

Critique lue 1.9K fois

64 j'aime

5 commentaires

Gand-Alf

Écrit par

Critique lue 1.9K fois

64
5

D'autres avis sur La Planète des singes

La Planète des singes
Torpenn
8

Charlton, air de Zeus.

Un des films que je voulais voir depuis une éternité, et il a très bien résisté à mes attentes. Classique incontestable de la Science-Fiction, le film de Schaffner arrive à être à la fois intelligent...

le 21 mai 2011

87 j'aime

21

La Planète des singes
Hypérion
8

You got what you wanted, tiger. How does that taste?

La Planète des singes est un film génial pour des tas de raisons mais dégraissons le mammouth au préalable, tout n'est pas parfait. Sur la forme, la réalisation a indéniablement vieilli, avec une...

le 6 sept. 2012

78 j'aime

7

La Planète des singes
Gand-Alf
10

Soudain, l'apocalypse.

Difficile de croire à l'époque qu'un petit film de science-fiction dont personne ne voulait et mettant en scène des singes anthropomorphiques allait contribuer, un peu avant le "2001" de Kubrick, à...

le 7 févr. 2013

64 j'aime

5

Du même critique

Gravity
Gand-Alf
9

Enter the void.

On ne va pas se mentir, "Gravity" n'est en aucun cas la petite révolution vendue par des pseudo-journalistes en quête désespérée de succès populaire et ne cherche de toute façon à aucun moment à...

le 27 oct. 2013

269 j'aime

36

Interstellar
Gand-Alf
9

Demande à la poussière.

Les comparaisons systématiques avec "2001" dès qu'un film se déroule dans l'espace ayant tendance à me pomper l'ozone, je ne citerais à aucun moment l'oeuvre intouchable de Stanley Kubrick, la...

le 16 nov. 2014

250 j'aime

14

Mad Max - Fury Road
Gand-Alf
10

De bruit et de fureur.

Il y a maintenant trente six ans, George Miller apportait un sacré vent de fraîcheur au sein de la série B avec une production aussi modeste que fracassante. Peu après, adoubé par Hollywood, le...

le 17 mai 2015

212 j'aime

20